René Descartes
René Descartes[1] (La Haye en 1596-Stockholm en 1650) est considéré comme le premier philosophe moderne. Penseur de son époque, il subit l’influence d’un milieu dans lequel la tradition subit les pressions des découvertes scientifiques et de la Réforme, qui remettent en question la vision catholique de l’autorité ecclésiastique sur le savoir.
Après avoir étudié chez les Jésuites, il obtient une licence de droit, en 1616. Puis, dès 1618, il s’engage dans l’armée, fait plusieurs voyages, tout en étudiant les sciences pour construire une méthode épistémologique aussi rigoureuse que celle des mathématiques. De 1629 à 1649, il demeure en Hollande et publie le fruit de ses investigations. Il passe quelques mois auprès de la reine Christine de Suède, avant de s’éteindre à Stockholm en 1650.
La première partie de la philosophie de Descartes consiste à démontrer que la vérité, telle qu’on la conçoit traditionnellement n’est pas aussi fondée qu’on le prétend, car elle s’impose dogmatiquement au lieu de laisser la raison libre découvrir les vérités apodictiques. Il faut donc faire table rase du passé. La lecture de son Discours de la méthode (1637) et de ses Méditations métaphysiques (1641), nous révèle un Descartes préoccupé par la poursuite de la certitude, qu’il entend substituer, par une rigoureuse méthode, à l’incertitude caractéristique du discours reçu. Après s’être soumis à l’ascèse du doute radical et méthodique, c’est-à-dire après avoir mis entre parenthèses tout savoir reçu, et même toutes sensations physiques, pensées et images du monde, qui peuvent tromper, il travaille à déterminer pour la connaissance un fondement sûr, qu’il pense trouver dans la raison individuelle. Quand bien même un malin génie me ferait mal penser, me ferait prendre la fiction pour la réalité, dit-il, ce qui est indéniable, c’est que je pense, et qu’ainsi je suis. C’est la deuxième partie de sa philosophie.
Jusqu’à aujourd’hui, la philosophie de Descartes a exercé une influence sur les plus grands penseurs, notamment durant le siècle des Lumières, qu’elle a contribué à faire s’élever. Pourtant, elle n’a pas été aussi radicale que Descartes le prétendait. La tabula rasa cartésienne est en effet bien lacunaire[2]. Le langage y est toujours utilisé dans ses dimensions logiques et signifiantes. Il n’y a de remise en question ni du raisonnement ni de la raison elle-même. Au contraire, Descartes présuppose que la raison fonctionne adéquatement.
Pierre-Luc VERVILLE
Bibliographie
- ALQUIÉ, Ferdinand, Descartes, l’homme et l’oeuvre, Paris, Hatier, 1956.
- ALQUIÉ, Ferdinand, Leçons sur Descartes, Paris, La Table Ronde, 2005.
- DESCARTES, René, Discours de la méthode, introduction et notes de Étienne Gilson, Paris,
Vrin, 1989.
- DESCARTES, René, Méditations métaphysiques, traduction de Florence Khodoss, Paris, Presses universitaires de France, 1989.
- DESCARTES, René, Règles pour la conduite de l’esprit, traduction de J. Sirven, Paris, Vrin, 1997.
- GILSON, Étienne, La liberté chez Descartes et la théologie, Paris, Vrin, 1987.
- GILSON, Étienne, Index scolastico-cartésien, Paris, Vrin, 1960.
- GILSON, Étienne, Études sur le rôle de la pensée médiévale dans la formation du système cartésien, Paris, Vrin, 1984.
- LEWIS, Geneviève-Rodis, L'individualité selon Descartes, Paris, Vrin, 1950.
- LEWIS, Geneviève-Rodis, La morale de Descartes, Paris, PUF, 1956.
- LEWIS, Geneviève-Rodis, Descartes et le rationalisme, PUF, coll. Que sais-je?, 1966.
- LEWIS, Geneviève-Rodis, L’Œuvre de Descartes, Paris, Vrin, 1971.
- LEWIS, Geneviève-Rodis, Descartes. Textes et débats, Paris, Hachette,1984.
- LEWIS, Geneviève-Rodis, L'anthropologie cartésienne, Paris, PUF, 1990.
- LEWIS, Geneviève-Rodis, Descartes. Biographie, Paris, Calmann-Lévy, 1995.
- LEWIS, Geneviève-Rodis, Le développement de la pensée de Descartes, Paris, Vrin, 1997.
- MARION, Jean-Luc, Sur l’ontologie grise de Descartes, Paris, Vrin, 1975.
- MARION, Jean-Luc, Sur la théologie blanche de Descartes, Paris, PUF, 1981.
- MARION, Jean-Luc, Sur le prisme métaphysique de Descartes, Paris, PUF, 1986.
- ↑ Le présent texte est le dernier de six synthèses respectives des six premières sessions du cours La pensée contemporaine que Amar DJABALLAH a donné à la Faculté de théologie évangélique en 2008. Le cours a été enregistré en 2008 et offert à distance à la session d’été 2020.
- ↑ Étienne GILSON a d’ailleurs défendu la thèse selon laquelle la pensée de Descartes n’est pas un nouveau départ, mais s’enracine dans la théologie scolastique sous l’influence des Jésuites : La liberté chez Descartes, Paris, Vrin, 1987 ; Index scolastico-cartésien, Paris, Vrin, 1960, Études sur le rôle de la pensée médiévale dans la formation du système cartésien, Paris, Vrin, 1984.