Théologie historique

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Discipline académique récente , la théologie historique est un projet théologique exposant l’étude de la doctrine chrétienne en identifiant les facteurs influençant son développement, son interprétation et sa formulation au cours de l’histoire de l’Eglise afin d’aider le théologien contemporain à demeurer dans l’orthodoxie en apprenant des erreurs du passé .

Se positionnant à l’intersection de l’histoire et de la théologie, elle s’intéresse aux relations et aux influences du contexte philosophique et social sur les théologiens pour comprendre et rendre compte des tensions historiques déterminantes dans l’élaboration du développement de la doctrine.

Objectifs

À l’instar de la théologie systématique, la théologie historique a pour but le perfectionnement des saints afin de ne plus être emportés à tous vents de doctrine . Pour ce faire, selon McGrath, elle aspire à être un outil pédagogique et critique en explicitant les présupposés et le conditionnement de l’environnement d’une époque sur l'expression de la doctrine. Elle vise à informer les théologiens systématiques concernant ce qui a été pensé dans le passé (et pourquoi!) tout en identifiant les facteurs exigeants la nécessité de reformuler (et de recontextualiser) . En soulignant l’importance de comprendre les raisons de l’émergence et des déviations de la doctrine, elle nous protège d’un triple danger.

Empêcher l’orgueil de l’individualisme oubliant la dimension corporative de la foi

Nous ne sommes pas les premiers à nous aventurer dans la fastidieuse formulation de la théologie. Malgré l’action éducative du Saint-Esprit dont une fonction est de nous enseigner et de nous conduire dans toute la vérité (Jn 14.26, 16.13), il serait arrogant de croire qu’il a débuté ce mandat avec nous, en oubliant qu’il a édifié l’église au cours de toutes les générations qui nous ont précédée, spécialement par l’octroi des dons ministériels (Eph 4.11-12). Dans cette perspective, la théologie historique est pédagogique, car elle nous oblige à prendre au sérieux notre héritage théologique, par un dialogue avec lui, afin de connaître les points de références vitaux pour nos débats contemporains . Elle nous offre l’état de la question sur une doctrine particulière, nous offrant des repères historiques : défenseurs notables de certains points de vue, forces et faiblesses des arguments proposés, conclusions des débats et documents de synthèse. Le défunt théologien CS Lewis a dit : « Mes propres yeux ne sont pas assez pour moi. Je vais voir au travers de ceux des autres. En lisant de la bonne littérature, je deviens un millier d’homme tout en demeurant moi-même ».

Refusant d’être limité aux présupposés de notre église locale, nous pouvons comprendre le christianisme en tant que mouvement planétaire ; la mémoire historique identifie les angles morts de nos interprétations. Bien évidemment, cette pratique cultive notre humilité, nous rappelant que nous sommes sur les épaules des géants qui nous ont précédés.

N’idolâtrer ni la tradition ni la nouveauté

Selon Allison , les chrétiens font deux erreurs fondamentales en ce qui concerne l’histoire de l’église. D’une part, les théologiens du passé n’ont pas bu directement à la fontaine de Dieu dans l’élaboration de la pensée chrétienne. Il faut éviter à tout prix de les idolâtrer en négligeant que la seule source de doctrine est la Bible et que personne ne l’a encore compris parfaitement. Christ sanctifie son église (Eph 5.26-27) à travers l’histoire qui n’a que Dieu comme souverain.

D’autre part, il faut résister à l’attrait de la nouveauté qui snobe le passé et méprise l’histoire, pensant que le neuf est toujours mieux. Rien ne nous empêche de nous inspirer de l’ancien pour revitaliser la doctrine actuelle . Il s’agit d’éléments nouveaux, mais en continuité avec la tradition.

Par conséquent, il faut toujours adresser notre doctrine actuelle en fonction de la Parole de Dieu en ne considérant pas infaillible les systèmes théologiques du passé.

Contextualiser sans syncrétisme

Dans un souci d’inculturation, il est attrayant mais toujours désastreux, de contextualiser la pensée chrétienne en la subordonnant aux présupposés philosophiques et culturels d’une époque lors de son élaboration. La théologie historique est critique, car elle démontre que les doctrines n’ont pas eu la même importance à chaque moment de l’histoire et que certaines circonstances ont favorisé l’émergence et le développement d’idées théologique, bonnes ou mauvaises, dont les erreurs commises ont pu être corrigées par une critique effectuée par les générations suivantes . Le christianisme a subi des attaques de toutes parts depuis sa naissance, amenant l’église à détailler son interprétation de la Parole Dieu et fournir des conclusions aux batailles doctrinales. Elle fournit un dialogue interconfessionnel démontrant que diverses perspectives sont acceptables, même si nous ne sommes pas actuellement d’accord. Par conséquent, elle rappelle le danger du syncrétisme et nous rassure que la Parole de Dieu, juste et véritable, finie toujours par triompher au bout du compte.

Méthodes et contenu

Les divergences d’opinion concernant la théologie historique se situent au niveau du choix de la méthode et du contenu.

Méthodes

Contrairement à Schleiermacher, la théologie historique ne fait pas parti des sciences religieuses ; elle n’est pas soumise aux disciplines historiques, mais demeure un domaine de la théologie. Selon la synthèse de l’encyclopédie biblio-théologique d’Amar Djaballah , nous pouvons constater que la théologie historique se distingue de l’histoire de l’Église et qu’elle contribue à la théologie systématique. La théologie historique a un rôle important en informant les autres disciplines des interprétations et des processus organisationnel du passé. Précisons qu’elle n’a pas de lien direct avec l’Écriture; par conséquent, elle se trouve sous l’autorité des disciplines qu’elle sert. Elle est donc ministérielle et non magistérielle, car elle ne possède pas l’autorité de déterminer la doctrine et la pratique. Deux approches sont fréquemment utilisées, soit les approches synchroniques et diachroniques. 1.2.1.1. Approche synchronique L’approche synchronique étudie la théologie dans une période de temps spécifique dans laquelle les doctrines et leurs développements sont traités ainsi que les auteurs. Il s’agit d’une organisation premièrement chronologique, et après topologique.

Son avantage est de fournir une meilleure identification de l’arrière-plan historique, des difficultés et des centres de réflexion théologiques. Elle identifie les théologiens clés, les développements de mots, phrases, concepts théologiques de cette époque, sans élaborer sur tous les sujets doctrinaux .

Son désavantage apparaît lors d’une recherche sur un point de doctrine particulier, alors qu’il faut parfois rechercher dans différent livre du même auteur pour connaître l’ensemble du développement de la doctrine.

Il y a consensus dans la délimitation des grandes époques de l’histoire de l’Église, soit la naissance de l’Église (NT to 600), le moyen-âge (600 – 1500), la réforme et contre-réforme (1500 – 1750) et la période moderne (1750 – présent).

Approche diachronique

L’approche diachronique étudie le développement de la pensée d’une doctrine au travers de toutes les périodes de l’histoire de l’église. Il s’agit d’une organisation premièrement topologique et après chronologique.

Ses avantages est l’accent sur les développements majeurs de chaque doctrine en laissant les voix du passé être entendus avec leur propres mots et leurs citations. Elle ne critique pas une position, mais elle utilise les voix du passé pour le faire.

Ses désavantages est de restreindre la critique des développements historiques selon la tradition théologique du chercheur, donnant ainsi une saveur confessionnelle, afin de bien représenter la pensé de chaque époque. En se concentrant sur les développements majeurs de chaque doctrine, elle s’autolimite aux références les plus significatives.

Dans l’approche diachronique, trois perspectives sont possibles . La perspective relativiste présume qu’il est impossible d’identifier un noyau de la foi chrétienne et porte donc attention sur la diversité, les nuances et la discontinuité. La perspective essentialiste présume qu’il existe une juste expression de la chrétienté alors que les autres sont déviantes, ce qui implique que certaines traditions, à certaines époques, se sont trompées. La perspective essentialiste modérée présume qu’il y a un noyau de doctrine chrétienne identifiable, mais qu’aucune église pure n’a existé, que l’écriture identifie l’incomplétude des connaissances théologiques des églises de chaque époque et que la formulation de la doctrine implique profondément l’arrière-plan culturel et les présupposés philosophiques de chaque période.

Contenu

Le contenu dépend de l’angle d’approche. Elle peut se restreindre à l’étude du dogme d’une confession religieuse ou prôner une approche plus large incluant les facteurs et les acteurs qui ont influencés le développement de la pensée chrétienne. La théologie historique, en tant que courroie d’engrenage entre l’histoire de l’église et la théologie systématique, apporte les acquis du premier pour faire réfléchir le deuxième . 1.2.2.1. Relation entre la théologie historique et l’histoire de l’église La théologie historique se distingue de l’histoire de l’église. Cette dernière identifie les facteurs au sein de l’histoire de l’église chrétienne qui sont d’importance pour comprendre le développement d’aspect de la théologie chrétienne . L’histoire est vitale, car elle fournit le contexte dans lequel la doctrine a été produite et définie .

Relation entre la théologie historique et la théologie systématique

La théologie historique peut déranger les dogmaticiens suite à l’exposition de faits inconfortables du passé ou à des vérités oubliées. Sauter de l’exégèse à la systématique sans considérer l’histoire du développement de la doctrine est une double erreur . La tradition rappelle que nous faisons souvent face à des questions qui ont été répondu dans le passé et des hérésies qui ne sont que recyclées. L’hérésie est un pendule oscillant d’un côté et de l’autre dans l’histoire. Pour Gerhard Ebeling, il s’agit de deux aspects de la même tâche herméneutique de la théologie : La théologie historique se concentre sur la tradition, alors que la dogmatique est préoccupée par l’obéissance contemporaine à la tradition, l’actus tradendi.

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