Philosophie

De Réformation tranquille
Sauter à la navigation Sauter à la recherche

La philosophie est une activité de l'esprit qui cherche, avec rigueur et discipline, « à articuler et à défendre une vision du monde », c'est-à-dire « une conception générale de l'univers »[1]. Étymologiquement, le mot philosophie signifie « amour de la sagesse ».

Historique

Philosophie antique

La philosophie antique naît dans la culture grecque, dominante durant l’Antiquité. Durant cette période historique, émerge une culture consciente de ce que l’univers est organisé (le cosmos). Les présocratiques, dont on connaît peu de choses par manque de traces, cherchent à comprendre le monde selon un élément/principe unique (eau, feu, air). Les trois grandes philosophes classiques Socrate, Platon et Aristote posent les bases de la philosophie occidentale. Trois autres courants philosophiques sont très importants durant la période antique : les épicuriens, les cyniques et les stoïciens.

Philosophie médiévale

Durant le Moyen Âge, le christianisme influence considérablement la philosophie. Toutefois, la philosophie chrétienne est mélangée à l'aristotélisme par Tomas D'Aquin.

Philosophie moderne

Les maîtres du soupçon

Les aspirations de l’homme moderne ne font pas l’unanimité au sein même de la modernité. Certains, notamment ceux que Paul Ricœur appelle les maîtres du soupçon[2], s’attaquent au projet moderne : Friedrich Nietzsche, Karl Marx et Sigmund Freud.

Friedrich Nietzsche

Philosophe inclassable, Friedrich Nietzsche (1844-1900) se dresse contre toutes philosophies et religions, au moyen d’une philosophie du marteau, pour reprendre l’idée que l’on retrouve dans le sous-titre de Crépuscule des idoles[3], écrit et publié en 1888.

La mort de Dieu

La pensée de Nietzsche en est une de réaction au discours religieux du XIXe siècle qui ne porte plus sur la réalité elle-même. Ce discours instrumentalise la religion dans le but de réconforter les gens, après l’avoir vidée de sa vérité ontologique. Avec Zarathoustra, figure du surhomme qui lui sert de porte-parole prophétique, Nietzsche prêche la « bonne nouvelle » de la mort de Dieu à ceux qui sont prêts à abandonner la faiblesse de l’éthique chrétienne, autrement dit de l’éthique de ceux qui, incapables de vivre, ont créé une morale de l’humilité, de l’obéissance et de l’hétéronomie. Par sa proclamation, Nietzsche veut informer ceux qui ne se rendent pas compte que Dieu n’est plus et que, désormais, c’est au surhomme de prendre la souveraine place. Il en tire les conséquences suivantes : il faut rejeter la morale et se libérer des prêtres et des philosophes qui, sournoisement, tentent de nous imposer leur point de vue.

La volonté de puissance

Pour Nietzsche, l’homme est régi par une énergie de vie qui l’oriente. L’interprétation du monde étant mue par cette énergie de vie, tout n’est qu’interprétation, manière de faire voir la « réalité ». Ainsi, nul besoin de s’écouter mutuellement, car chacun lutte pour imposer aux autres sa propre interprétation. Cette impulsion qui consiste à marquer son autorité sur les autres, Nietzsche la nomme volonté de puissance[4].

Karl Marx

Une autre source d’intérêt suscitée par la raison occidentale est le marxisme. Cette vision rationaliste du monde reprend des idées de Hegel[5], mais en les renversant. Pour le philosophe et économiste Karl Marx (1818-1883), la condition de l’homme moderne est inacceptable en raison des injustices que causent ses lois économiques. Il remarque que la vision de l’histoire de Hegel tend nécessairement vers le communisme ou le socialisme. Si l’on comprend l’histoire, se contente de prédire Marx, l’effondrement du capitalisme est inévitable[6]. Tout en puisant plusieurs de ses idées à même les religions, il enseigne qu’il faut se débarrasser des religions. Cependant, tandis que Marx pensait que ses idées se répandraient en Grande-Bretagne, c’est en URSS et en Chine qu’elles germeront. Hélas, les conséquences de la concrétisation de l’idéologie marxiste seront des millions de morts[7]. Cela disqualifie les prétentions prévisionnistes de Marx.

L'aliénation

À ceux qui donnent aux capitalistes leurs forces productives, Marx veut faire réaliser les conditions aliénantes qu’ils subissent. Ses analyses montrent que, dans le capitalisme, les travailleurs sont aliénés quant aux résultats de leur travail, c’est-à-dire qu’ils ne possèdent rien de ce qu’ils ont fabriqué . Le fruit de leur labeur, plutôt que de leur appartenir, appartient à l’employeur. Face à cette aliénation, la religion n’est d’aucune aide, car elle empêche les ouvriers de réaliser leur situation d’esclavage et, n’étant qu’un engourdissement temporaire, elle ne peut agir sur les causes de cette aliénation. L’espoir est dans un nouveau système économique, sans classe dominante.

Sigmund Freud

Médecin et inventeur de la psychanalyse, Sigmund Freud (1856-1939) fait deux découvertes majeures : l’inconscient, qui a profondément blessé le cogito de l’homme moderne[8], et la libido[9].

L'inconscient

Depuis Descartes, on pensait que l’homme était maître de lui-même. La raison était conçue comme permettant la connaissance claire de l’homme et du monde. Or, avec l’inconscient, Freud réalise que l’être humain n’a pas de connaissance directe de lui-même. En effet, la raison ne lui permet pas de se connaître tel qu’il est. Au contraire, ses motivations et ses actions ne sont pas en adéquation. Par son surmoi, l’homme va même jusqu’à se fabriquer des illusions religieuses. La thérapie est alors nécessaire pour que le patient prenne conscience de ses motivations profondes et cachées.

La libido

Pour Freud, ce qui est premier dans la motivation et l’agir humain, c’est la libido. La libido est une énergie sexuelle au sens vital du terme. Dans la petite enfance, cette libido engendre un conflit duquel dépend le reste de la vie de l’individu. Pour cette raison, la thérapie freudienne vise à aider le patient à guérir ses blessures psychiques par un retour psychanalytique à la petite enfance. Parmi les importants conflits inconscients s’opérant durant la petite enfance, le complexe d’œdipe est un ensemble de désirs dans lequel l’enfant est tiraillé entre pulsion secrète de tuer son père pour posséder sa mère, et pulsion d’amour envers celui-ci[10].


Yanie PIERRE-JÉRÔME et Pierre-Luc VERVILLE

Notes et références

  1. John FRAME, A History of Western Philosophy and Theology, Phillipsburg, P & R Publishing, 2005.
  2. Paul RICŒUR, De l’interprétation, Paris, Seuil, 1965.
  3. Friedrich NIETZSCHE, Crépuscule des idoles, Paris, Gallimard, 1977.
  4. Idem., Le Gai savoir, Paris, Gallimard, 1950 ; Généalogie de la morale, Paris, Gallimard, 1966.
  5. G.W.F. HEGEL, La raison dans l’histoire, Paris, Hatier, 2000.
  6. Karl MARX, Le capitale, Tomes I, II, III, Paris, Éditions sociales, 1976.
  7. Paradoxe suprême : pour le bien du peuple, on a tué le peuple.
  8. Paul RICŒUR, Le conflit des interprétations, Paris, Seuil, 1969.
  9. Sigmund FREUD, Le rêve et son interprétation, Gallimard, 1969 ; Trois essais sur la théorie sexuelle, Gallimard, 1989.
  10. Sigmund FREUD, Cinq leçons sur la psychanalyse, Payot, 2001.

Bibliographie

  • ARISTOTE, Éthique à Nicomaque, trad. française de J. Tricot, Paris, Vrin, 1959.
  • AUGUSTIN, Saint, Confessions, trad. du latin par Robert Arnauld d'Andilly, édition de Philippe Sellier, traduction établie par Odette Barenne, Paris, Gallimard, 1995.
  • BACON, François, Œuvres de François Bacon, 2 volumes, Paris, Charpentier, 1799-1802.
  • D’AQUIN, Thomas, Somme théologique, 4 t., Cerf, Paris, 1984-1986.
  • DARWIN, Charles, L’origine des espèces, traduction de Edmond Barbier, Paris, Flammarion, 1999.
  • DESCARTES, René, Discours de la méthode, introduction et notes de Étienne Gilson, Paris, Vrin, 1989.
  • DESCARTES, René, Œuvres et lettres, édition d’André Bridoux, Paris, Gallimard, 1937.
  • DJABALLAH, Amar, La pensée contemporaine, cours professé à la Faculté de théologie évangélique, Montréal, 2008/2020.
  • FRAME, John, A History of Western Philosophy and Theology, Phillipsburg, P & R Publishing, 2005.
  • FREUD, Sigmund, Cinq leçons sur la psychanalyse, Payot, 2001.
  • FREUD, Sigmund, Le rêve et son interprétation, Gallimard, 1969
  • KANT, Emmanuel, Critique de la faculté de juger suivi d’Idée d’une histoire universelle au point de vue cosmopolitique et de Réponse à la question : Qu’est-ce que les Lumières ?, Paris, Gallimard, 1989.
  • HEGEL, G. W. F., La raison dans l’histoire, Paris, Hatier, 2000.
  • LIPOVETSKY, Gilles, L’Empire de l’éphémère : la mode et son destin dans les sociétés modernes, Paris, Gallimard, 1987.
  • LUTHER, Martin, Œuvres, tome I, Paris, Gallimard, 1999.
  • MARX, Karl, Le capitale, Tomes I, II, III, Paris, Éditions sociales, 1976.
  • MONOD, Jacques, Le Hasard et la Nécessité, Paris, Seuil, 1970.
  • NIETZSCHE, Friedrich, Crépuscule des idoles, Paris, Gallimard, 1977.
  • PLATON, La République, introduction, traduction et notes de Georges Leroux, Paris, Flammarion, 2002.
  • RICŒUR, Paul, De l’interprétation, Paris, Seuil, 1965.

Voir aussi

René Descartes, Pensée contemporaine