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La durée des sons est déterminée par les figures de notes. Les plus communes sont la ronde, la blanche, la noire, la croche et la double croche. Une ronde a la durée de deux blanches, de quatre noires, de huit croches, de seize double-croches, etc. Ainsi, lorsqu’une noire vaut un temps, une blanche en vaut deux et une ronde quatre, tandis qu’une croche vaut 1/2 temps. La valeur des notes est relative aux chiffres indicateurs (ci-dessous). À titre d’exemple, si on est en 4/4, la ronde vaut 4 temps, la blanche 2 temps, et la noire 1 temps.
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La durée des sons est déterminée par les figures de notes. Les plus communes sont la ronde, la blanche, la noire, la croche et la double croche. Une ronde a la durée de deux blanches, de quatre noires, de huit croches, de seize double-croches, etc. Ainsi, lorsqu’une noire vaut un temps, une blanche en vaut deux et une ronde quatre, tandis qu’une croche vaut 1/2 temps.
  
 
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Version actuelle datée du 15 janvier 2022 à 10:16

La musique est l’art d’organiser volontairement les sons de manière à produire des affects. Elle fait partie de l’épopée humaine depuis la nuit des temps et nous la retrouvons dans l’ensemble des civilisations à toutes les époques, et elle apparaît même en temps de guerre, de famine, de maladie, de deuil et de pauvreté. C’est dire qu’elle n’est ni un luxe ni une activité inhabituelle de l’être humain.

Or la musique n’est pas sans effets sur nous. Si elle est rythmée, elle peut nous amener à danser ou à taper du pied. Elle peut aussi nous donner envie de faire de la musique à notre tour. Elle peut parfois nous inciter à bien ou à mal agir ou encore nous aider donner un sens à la vie ou du moins à nos activités. De plus, la musique est, de nos jours, particulièrement omniprésente. Qu’on y porte attention ou non, elle fait partie de notre environnement quotidien, de nos activités les plus triviales. Dans les centres d’achat, elle est tantôt énergique, tantôt tranquille, ce qui n’est certainement pas sans nous stimuler, nous inciter à acheter. Lorsque nous allons au restaurant, des chansons sont jouées en arrière-plan pour servir d’ameublement sonore. Si nous utilisons le transport en commun, il est fort probable que la radio soit ouverte. Lorsque nous attendons pour voir le médecin dans une clinique, la salle d’attente est souvent bercée de mélodies apaisantes, tandis que dans les films d’action, de suspens et d’horreur les motifs musicaux nous tiennent en haleine. Enfin, à l’église, la musique accompagne le culte.

En raison des effets de la musique et de son omniprésence contemporaine, chercher à la comprendre ne nous semble pas superflu. Nous voudrions donc ici en survoler la théorie, les principaux moyens de son émission, ainsi que son histoire.

Théorie musicale élémentaire

Comme l’écriture et la lecture d’une langue, on peut lire et écrire les sons musicaux. Pour ce faire, on utilise des signes. Ces signes et les règles de leurs combinaisons sont l’objet de la théorie musicale. Dans ce chapitre, nous couvrirons la théorie musicale de base. Nous verrons les notions suivantes : la portée, les clefs de sol et de fa, les tiges, les figures de notes et de silences, les mesures et les barres de mesure, les chiffres indicateurs, les signes de reprise et les nuances.

La portée

C’est sur la portée que l’on dispose les signes utilisés pour représenter les sons musicaux qui sont appelés notes. La portée se compose de cinq lignes horizontales. Ces cinq lignes sont parallèles et à égale distance les unes des autres.

Les lignes et les interlignes

Les lignes et les espaces compris entre les lignes, que l’on nomme interlignes, se comptent de bas en hauts. On compte cinq lignes et quatre interlignes.

La hauteur du son est indiquée par la position de la note sur la portée. Plus elle est haute sur la portée, plus elle est aiguë ; plus elle y est basse, plus elle est grave.

Les lignes supplémentaires

On peut ajouter des lignes supplémentaires au-dessus ou au-dessous de la portée, si nécessaire.

Les clefs

La clef est le signe qui indique le nom et la hauteur des notes inscrites sur la portée. Elle est placée au début de la portée et signale d’abord la note à laquelle elle donne son nom. Il existe trois clefs : de fa, de sol et d’ut. Les deux plus communes sont les clefs de sol et de fa.

La clef de sol

La clef de sol 𝄞 forme un cercle autour de la deuxième ligne dont la note est alors sol.

La clef de fa

La clef de fa 𝄢 contient deux points : un au-dessus et un au-dessous de la quatrième ligne dont la note est alors fa. À partir de ces repères, on déduit les autres notes (do, ré, mi, fa, sol, la, si, do).

 Les tiges

Lorsqu’une note nécessite une tige, on doit diriger celle-ci vers le haut quand la note est placée sous la ligne du milieu (la troisième ligne) et vers le bas lorsqu’elle est placée au-dessus de cette ligne.

Les figures de notes

La durée des sons est déterminée par les figures de notes. Les plus communes sont la ronde, la blanche, la noire, la croche et la double croche. Une ronde a la durée de deux blanches, de quatre noires, de huit croches, de seize double-croches, etc. Ainsi, lorsqu’une noire vaut un temps, une blanche en vaut deux et une ronde quatre, tandis qu’une croche vaut 1/2 temps.

Figures de notes Figures de silence
Ronde = Pause
Blanche = Demi-pause
Noire = Soupir
Croche = Demi-soupir
Double-croche = Quart-de-soupir

La valeur des notes est relative aux chiffres indicateurs (ci-dessous). À titre d’exemple, si on est en 4/4, la ronde vaut 4 temps, la blanche 2 temps, et la noire 1 temps.

Figures rythmiques Durée en 4/4
Ronde 4 temps
Blanche 2 temps
Noire 1 temps
Croche ½ temps
Double-croche ¼ temps

De plus, afin de faciliter la lecture, certaines figures de notes sont regroupées par des traits horizontaux, qui peuvent être plus ou moins inclinés.

Les figures de silences

Les figures de silence indiquent la longueur de l’interruption entre les sons. Les principales figures de silence sont : la pause, la demi-pause, le soupir, le demi-soupir et le quart de soupir. Comme pour les figures de note, la valeur de chaque figure de silence dépend du chiffre indicateur. Si on est en 4/4, la pause vaut 4 temps, la demi-pause 2 temps, le soupir 1 temps, le demi-soupir ½ temps et le quart de soupir ¼ de temps.

Les mesures et les barres de mesure

L’espace compris entre deux barres de mesure se nomme mesure. Pour signaler la fin d’une pièce, on utilise une double barre de mesure. Celle-ci est composée de deux lignes dont la seconde est plus épaisse. La mesure implique la division du rythme en valeurs proportionnelles (unités de temps). Les valeurs des figures de notes ou de silences s’additionnent pour remplir le nombre de temps de la mesure.

Les chiffres indicateurs

Le nombre de temps contenus dans chaque mesure est exprimé par un signe que l’on nomme chiffres indicateurs. Ce signe est composé de deux chiffres dont l’un est placé au-dessus de l’autre. Ce dernier, le chiffre indicateur supérieur, détermine le nombre de temps contenu dans chaque mesure. C’est le numérateur. Le chiffre indicateur inférieur, quant à lui, détermine la figure de note équivalent à un temps dans la mesure. C’est le dénominateur. Parmi les plus chiffres indicateurs communs : le 4/4, le 3/4, le 2/4 et le 2/2. En ce qui concerne le 4/4, on peut dire que la mesure contiendra 4 temps équivalent à la valeur d’une noire. En outre, le chiffre indicateur 4/4 peut être remplacé par un C.

Chiffre indicateur inférieur Figure de note équivalent à un temps
1 Ronde
2 Blanche
4 Blanche
8 Croche
16 Double-croche

Les signes de reprise

On encadre de doubles-barres une partie pour indiquer qu’il faut la répéter. Si cette partie se trouve au début de la pièce, on n’a besoin que d’une double-barre de reprise à la fin de la partie à répéter.

Pour remplacer une ou plusieurs mesures à la fin de la partie, on se sert de boîtes de reprise.

Pour répéter une section plus longue d’une pièce on utilise souvent le système de renvoi. D.S (dal segno) signifie qu’il faut répéter à partir du symbole segno. D.C. (da capo) signifie qu’il faut répéter à partir du début. Ces deux symboles peuvent être accompagnés d’un AL FINE ou d’un TO CODA. Fine indiquera ou se trouve la fin. TO CODA indique qu’il faut répéter telle section jusqu’au signe coda pour ensuite poursuivre avec la partie coda (à la fin de la pièce).

Les nuances

Les sons ne sont pas toujours joués avec la même intensité. Lorsqu’un son est doux, on dit qu’il est piano, lorsqu’il est fort, on dit qu’il est forte. Pour augmenter ou diminuer progressivement l’intensité du son, on emploie le crescendo (en croissant, de plus en plus fort) ou le decrescendo (en décroissant, de plus en plus doux). Voici un tableau des nuances principales :

Termes Symboles Signification
Pianississimo ppp Le plus doux possible
Pianissimo pp Très doux
Piano p Doux
Mezzo piano mp Moyennement doux
Mezzo forte mf Moyennement fort
Forte f Fort
Fortissimo ff Très fort
Fortississimo fff Le plus fort possible
Crescendo 𝆒

En croissant,

de plus en plus fort

Decrescendo 𝆓

En décroissant,

de plus en plus doux

Les voix et les instruments de musique

Les voix

Voix
Voix de femme

(ou d’enfants)

Aigüe Soprano

Mezzo-soprano

Grave Contre-alto

Alto

Voix d’homme Aigüe Ténor (premier ténor ; second ténor)

Baryton ou première basse

Basse-taille ou seconde basse

Grave
Ensembles vocaux
Quatuor Soprano, alto, ténor, basse
Quintette Soprano, alto, ténor, basse, et voix intermédiaires
Chorale Mêmes voix ou voix mixtes
Chœur Mêmes voix ou voix mixtes

Les instruments de musique

Familles d'instrument Instruments
Instruments à cordes Instruments à cordes frottées Violon
Alto
Violoncelle
Contrebasse
Instruments à cordes pincées Guitare classique
Guitare acoustique
Harpe
Banjo
Mandoline
Instruments à vent Bois Instruments à biseau Piccolo
Flûte traversière
Flûte à bec
Instruments à anche simple Clarinette
Clarinette basse
Saxophone soprano
Saxophone alto
Saxophone ténor
Saxophone baryton
Instruments à anche double Hautbois
Cor anglais
Basson
Contrebasson
Cuivre Trompette
Trombone
Euphonium
Tuba
Instruments à percussion Idiophones à sons déterminés Xylophone
Marimba
Vibraphone
Glockenspiel
Cloches tubulaires
Gong
Tambour métallique
idiophones à sons indéterminés Tam-tam
Cloches agogos
Triangle
Cymbales
Blocs chinois
Castagnettes
Carillon à tiges
Vibraslap
Bâton de pluie
Membraphones à sons déterminés Timbales
Membraphones à sons indéterminés Tambour de basque
Congas
Timbales
Grosse-claisse
Toms de concert
Rototom
Caisse-claire
Instruments électroniques Synthétiseur
Boîte à rythmes
Batterie électronique
Instruments à effet Flexatom
Scie musicale
Clarine
Sand-blocks
Peitschenknall
Enclume
Schelenreif
Imitateurs d’animaux
Crécelle
Machines à tonnerre et à vent

Histoire de la musique occidentale

L’histoire de la musique est la discipline qui étudie l’évolution de la musique à travers les âges. Afin de bien situer les œuvres dans leur contexte historique, nous devons passer par cette discipline académique. Nous savons qu’il est important d’étudier l’histoire pour ne pas en répéter les erreurs. Puisque l’histoire de la musique nous aide à comprendre l’histoire en général, il va sans dire que son étude est aussi importante. Pour bien comprendre une personne, nous devons connaître son histoire. Il en est de même de la musique[1]. Je propose un bref survol des différentes périodes de cette histoire, dans l’espoir qu’il vous servira à mieux contextualiser les musiques qui nous parviennent des siècles passés. Nous commencerons par l’Antiquité car, la musique étant plus évanescente par nature que les arts plastiques, celle d’avant l’Antiquité échappe à l’histoire par le manque de traces. Les Écritures hébraïques (la Torah, l’Ancien Testament) mentionnent toutefois le nom de Jubal, comme ancêtre de tous ceux qui jouent de la harpe et du chalumeau (ancêtre de la clarinette).

La musique antique

Nous connaissons la musique de la Grèce antique par le témoignage de plusieurs théoriciens antiques. De plus, quelques compositions, souvent lacunaires, ont été retrouvées. Le rythme constitue le matériau principal de la musique, encore que la mélodie ne soit pas en reste. Dans la Grèce antique, on utilisait les gammes descendantes heptatoniques. Les mélodies des grecs de l’Antiquité sont composées à partir des huit modes suivants : le dorien, le phrygien, le lydien, le myxolydien, l’hypodorien, l’hypophrygien, l’hypolydien et l’hypomyxolydien. Les mélodies vocales suivaient les rythmes de la poésie, selon la métrique du vers. Les instruments de cette époque sont la lyre, la cithare et l’aulos et servaient surtout à doubler la mélodie. Par la suite, les Romains se sont appropriés la musique des Grecs, mais ils l’ont trivialisée. La musique est devenue plus de l’ordre du divertissement que du sacré. Dans l’Antiquité tardive, la musique des premiers chrétiens empruntera au culte juif, à travers les psaumes (le roi David un prolifique psalmiste) et les chants (on en retrouve plusieurs dans le Pentateuque et dans les Livres poétiques du Tanakh ou Bible juive : chant de Moïse, Cantique des cantiques, etc.).

La musique médiévale

Le Moyen Âge, qui débute Ve siècle et se termine au milieu du XVe, est marqué par les premières musiques chrétiennes, le chant grégorien (fin du VIe siècle), la formation de la polyphonie et l’« Ars Nove » (Moyen Âge tardif). Le Moyen Âge prend racine dans l’Antiquité. La psalmodie, les chants antiphoniques et les répons proviennent des cérémonies juives anciennes. Il n’y avait pas de partition pour la musique médiévale des débuts. On comptait énormément sur la tradition orale pour la transmission des mélodies. Le système notationnel commencera à se développer avec l’apparition de signes aide-mémoire : les neumes.

La musique de la Renaissance

À la Renaissance (vers 1450 à 1600), on redécouvre l’Antiquité à travers sa littérature. Ce retour au passé ne sera pas sans effet sur la musique. La redécouverte de la Bible en langues originales (hébreux, araméen et grec) conduira notamment à une Réforme de l’Église (protestantisme), qui affectera la liturgie, dont la musique convergera vers une expression plus populaire, autrement dit plus accessible, avec notamment des paroles en langue vulgaire (français, allemand, anglais, etc.). Cette convergence est manifeste dans les chorals de Martin Luther, qui fût un grand réformateur. La musique de la Renaissance se situe cela dit en continuité avec les siècles précédents. En effet, la polyphonie s’y stabilise[2]. Parmi les compositeurs importants de la Renaissance se trouve Josquin des Prés, auquel Luther se réfère lorsqu’il encourage Johann Walther, premier cantor luthérien et auteur du premier recueil de chants polyphoniques protestants, à s’en inspirer. Le compositeur le plus original de la Renaissance est sans doute Clément Janequin dont l’œuvre la plus fameuse est le Chants des oiseaux. Il faut mentionner un autre grand compositeur de la Renaissance, Palestrina[3], dont les œuvres sont écrites ­a cappella, c’est-à-dire sans accompagnement instrumental. Enfin, soulignons au passage que l’imprimerie contribuera au renouveau musical de cette période en facilitant la diffusion de la musique que ce soit par l’impression de partitions ou de traités de théorie musicale.

La musique baroque

Le baroque en musique (1600 à 1750) se caractérise par un discours contrapuntique très ornementé. Le vocabulaire baroque est caractérisé par une accentuation de l’ornement, du mouvement, de l’illusion et de la mise en scène religieuse[4]. Durant le baroque, le tempérament égal, c’est-à-dire la séparation en douze tons égaux de l’octave, s’épanoui. Le compositeur Jean-Sébastien Bach, génie comme on n’en rencontre qu’aux 1000 ans[5], représente l’apogée de cette période et, par le fait même, du contrepoint. On peut dire que le contrepoint est la langue maternelle de Bach[6]. Antonio Vivaldi, grand virtuose illustre pour les Quatre saisons est une autre figure de proue du baroque[7].

La musique classique

Hayden, Mozart, et Beethoven sont les grands représentants du classicisme musical (1750-1830). Ces trois compositeurs « évoquent une façon de penser et de sentir, une tournure d’esprit se manifestant par la maîtrise de la forme, la recherche d’un plan, une structure régulière, un langage harmonique et un programme tonal clairs, une certaine réserve dans l’expression, la carrure régulière de la mélodie, l’emploi de rythmes simples »[8]. De là le primordial souci de mettre en valeur la ligne mélodique par une harmonisation plus horizontale que verticale, le style classique rompt avec le discours contrapuntique très ornementé des compositeurs baroques. En outre, on dit de Beethoven qu’il annonce le romantisme. Déjà dans sa troisième symphonie, il transgresse les frontières du classicisme.

La musique romantique

Le XIXe siècle en musique est celui du romantisme et de ses ramifications en écoles dites nationales. Le romantisme est marqué par la préséance du sentiment sur la raison. Les compositeurs romantiques allemands entreprennent de pousser plus loin le classicisme ou de le dépasser. Les Romantiques veulent que leur art touche plus immédiatement le fort intérieur du spectateur, quitte à faire éclater la forme[9]. Les premiers compositeurs romantiques sont Weber, créateur de l’opéra national allemand, et Shubert, qui parfait le lied (Larousse, 2018). Le romantisme a pour figures révolutionnaires Hector Berlioz, Johannes Brahms et Richard Wagner. Des romantismes nationaux se développent en Norvège avec Grieg, en Russie (le groupe des Cinq et Tchaïkovsky), en France (George Bizet) et en Italie (Verdi).

La musique moderne

Au début du XXe siècle, la musique est en pleine révolution. C’est le modernisme. La musique moderne se caractérise par une réaction au système tonal. À Vienne, Arnold Schönberg invente le dodécaphonisme, musique atonale basée sur une distribution égalitariste des douze notes de la gamme chromatique. À Paris, Claude Debussy (grand-père du modernisme), précurseur de la modernité musical et source d’inspiration de Varèse, de Messiaen et de Boulez, révolutionne les notions de temps et d’espace en musique[10]. Il le fait entre autres au moyen de formes à la fois ouvertes et statiques et d’harmonies non fonctionnelles[11]. Igor Stravinsky lui-aussi innove : il fait œuvre d’avant-gardiste dans le domaine du rythme et de l’harmonie en travaillant le matériau de manière à le rendre à la fois irrégulier et en tension, voire tribal ou sauvage, en particulier dans le Sacre du printemps. Erik Satie, père du modernisme, initie, pour sa part, une musique autocritique, autrement dit se remettant elle-même en question. Aussi, une seconde vague de nationalismes musicaux se développe au XXe siècle, avec des compositeurs comme le Finlandais Sibelius et le Hongrois Béla Bartok. L’entre-deux-guerres est marqué Maurice Ravel, Sergueï Prokofiev, Paul Hindemith, le groupe des Six, et Olivier Messiaen. Tout comme Albert Einstein l’a fait à travers la science, les compositeurs de musique moderne nous ont fait revoir, à travers la musique, notre conception du temps et de l’espace. Le XXe est aussi celui du jazz, qui apparaît parallèlement à la musique moderne et qui bientôt la prolonge et l’enrichie[12].

La musique contemporaine

L’expression « musique contemporaine » désigne la musique savante de la seconde moitié du XXe siècle. Entre 1945 et 1950, c’est la musique sérielle qui domine le paysage de l’intelligentsia musicale, avec Pierre Boulez, Karlheinz Stockhausen, Luigi Nono et Luciano Berio. Après 1950, la musique expérimentale s’impose. Électronique avec Iannis Xenakis, aléatoire avec John Cage, concrète avec Pierre Schaeffer, répétitive avec Steve Reich, la musique expérimentale se veut avant-gardiste, cultivant méthodiquement l’innovation sonore.

Dans les œuvres de John Cage le hasard est promu au rang de procédé de composition. Ce compositeur adepte du bouddhisme zen compose certaines pièces en laçant des dés, relayant ainsi le choix des paramètres de hauteurs à un processus aléatoire. John Cage est aussi l’inventeur du piano préparé. À défaut d’avoir accès à des percussions, il décida un jour de placer des objets quotidiens dans la table d’harmonie d’un piano. Le résultat fut fulgurant. Lorsqu’il activait les touches de l’instrument, les sons devenaient comme ceux d’instruments à sons indéterminés. L’indétermination est d’ailleurs l’une des problématiques principales du travail de ce musicien qui fut probablement le premier homme à avoir marché non pas sur la lune mais sur un territoire où sont confondus la musique et la vie.

Dans les années 1970, la musique spectrale, influencée par les avancées technologiques en matière de timbre, fait son apparition sous la conduite de l’informatique musicale. Un compositeur comme Tristan Murail cherchera à faire reproduire par l’orchestre les phénomènes microtemporels du déploiement du son (attaque, déclin, etc.), notamment par l’utilisation de techniques de jeu étendues et de microtons, en s’aidant du spectromètre (analyse spectrale) et de calcul mathématique (analyse de Fourier).

Enfin, le compositeur satirique Frank Zappa a effectué, pendant les dernières décennies du XXe siècle, le mélange burlesque entre la musique savante moderne et contemporaine et la musique populaire. De son propre aveu, Zappa est à la musique populaire ce que Stravinsky est à la musique classique. Il s’est amusé à travestir et parodier les genres musicaux les plus disparates dans un pluristylisme des plus sarcastiques : le jazz (The Dangerous Kitchen, Hot Plate Heaven at the Green Hotel), la pop (Elvis Has Just Left the Building, Any Kind of Pain), le rhyhm and blues (Love of my Life), le country et le western (Truck Driver Divorce), le ska (We Are Not Alone), etc.


Pierre-Luc VERVILLE

Notes et références

  1. Paul-Émile MCCAUGHAN, ibid., p. 255.
  2. Voir Charles VAN DEN BORREN.
  3. Victor Hugo n’hésite pas à qualifier Palestrina de « père de l’Harmonie ».
  4. Encyclopédie Larousse, 2018.
  5. Comme me le faisait remarquer mon professeur d’herméneutique Amar Djaballah lors d’une discussion.
  6. Sous la direction de Jean et Brigitte MASSIN, Histoire de la musique occidentale, 1987, p. 498.
  7. Rémy STRICKER, Musique du Baroque, Paris, Gallimard, 1969.
  8. Encyclopédie Larousse, 2018.
  9. Alfred EINSTEIN, La musique romantique, Paris, Gallimard, chapitre II, 1959.
  10. « Claude Debussy », Encyclopédie Larousse, 2018.
  11. Ibid.
  12. Juliette GARRIGUES, « MUSIQUES SAVANTES ET MUSIQUES POPULAIRES », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 17 septembre 2018, http://www.universalis.fr/encyclopedie/musiques-savantes-et-musiques-populaires/

Bibliographie

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