Herméneutique biblique : Différence entre versions
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BERKHOF, Louis, ''Principles of Biblical Interpretation: Sacred Hermeneutics'', Grand Rapids, Baker, 1950, 2e édition, 1977. | BERKHOF, Louis, ''Principles of Biblical Interpretation: Sacred Hermeneutics'', Grand Rapids, Baker, 1950, 2e édition, 1977. | ||
− | DJABALLAH, Amar, ''Herméneutique de la Bible'', notes | + | DJABALLAH, Amar, ''Herméneutique de la Bible'', notes du cours Herméneutique I, Montréal, Faculté de théologie évangélique, 2010. |
FEE, Gordon et STUART, Douglas, ''Un nouveau regard sur la Bible'', Deerfield, Éditions Vida, 1990. | FEE, Gordon et STUART, Douglas, ''Un nouveau regard sur la Bible'', Deerfield, Éditions Vida, 1990. |
Version du 16 août 2020 à 06:10
L’omniprésence de la question herméneutique en théologie, comme en philosophie, est d’apparition récente[1]. Avant 1970, ce sont surtout les spécialistes d’études bibliques qui rencontrent le terme, en théologie dans la « nouvelle herméneutique » de Rudolf Bultmann et ses disciples. En philosophie, l’herméneutique forme le noyau des réflexions de Hans-George Gadamer et, éventuellement, de Paul Ricœur. Néanmoins, l’herméneutique a manqué ne jamais connaître le succès. En effet, la vague du structuralisme[2], qui déferle dans les années 1960, et à laquelle succède l’onde sémiologique, menace d’emporter les biblistes désillusionnés par les promesses non tenues des méthodes historico-critiques. En 1969, le déferlement emporte effectivement les membres de l’Association Catholique Française pour l’Étude de la Bible (ACFEB) réunis lors d’un congrès à Chantilly.
Dans les années 1980, l’herméneutique s’abattra sur l’Occident philosophique, pour devenir, selon le philosophe Gianni Vattimo, la koïnè contemporaine. Jean Greisch, spécialiste de l’herméneutique de Heidegger et de Ricœur, parlera même de l’« âge herméneutique de la raison » pour qualifier notre époque. Quoique retardataire, la théologie évangélique n’y échappera pas[3] ; alors que le terme sonnait creux lors du seul exposé concernant le sujet, en 1977 lors du premier « Congrès international sur l’inerrance de la Bible », tous les exposés du second, en 1983, lui seront consacrés[4]. En guise d’initiation à l’herméneutique biblique, le présent travail propose de réfléchir bibliquement et théologiquement au phénomène de l’interprétation. Il a pour objectif d’introduire les notions de base de cette discipline, dont les domaines d’application couvrent autant l’interprétation de la Bible que l’interprétation selon la Bible.
Dans une perspective évangélique, il s’agira d’articuler le projet d’une herméneutique biblique en paraphrasant, résumant et synthétisant les notes du cours. D’abord, nous expliciterons la nature de l’herméneutique biblique, avec ses définitions et ses objectifs. Ensuite, nous en cernerons les difficultés, pour en suggérer d’envisageables solutions. Enfin, puisque nous la considérons comme biblique lorsqu’elle a pour objet la Bible ou qu’elle en dépend, nous croyons positif de la situer, tout en respectant les critères de son éthique, dans un contexte pluridisciplinaire plus large. Ainsi, avant d’énumérer quelques-uns des risques les plus dangereux pour l’herméneutique, nous convoquerons, dans l’intention de ne pas minimiser les apports de la philosophie, de la littérature et de la linguistique pour notre discipline, les acquis de l’herméneutique comme théorie et comme pratique.
Sommaire
Qu’est-ce que l’herméneutique biblique?
Définitions
Tout d’abord, qu’est-ce que l’herméneutique? À cette question répond la définition quelque peu moderniste du théologien Louis Berkhof : « L’herméneutique est la science qui nous enseigne les principes, les lois et les méthodes de l’interprétation»[5]. Plus classique, Bernard Ramm rappelle qu’il ne s’agit pas seulement d’une science, mais aussi d’un art. Certes, l’herméneutique est une science en ce qu’elle « est guidée par des règles à l’intérieur d’un système » ; cependant, « on en fait l’application avec habileté et non par imitation mécanique »[6]. Nous dirons donc que l’herméneutique est l’art et la science de l’interprétation, et qu’elle est biblique lorsqu’elle concerne la Bible ou en dépend. Bien qu’il faille entendre par science un savoir organisé et ayant son objet d’étude, son domaine, ses cadres, ses modèles et ses méthodes, l’interprétation ne se fait pas sans la présence d’un interprète, qui à son tour ne saurait faire l’économie de la dimension applicative de la compréhension. En effet, une attention strictement gnoséologique risquerait de compromettre le discernement du sens lui-même. Comme Amar Djaballah le mentionne, l’herméneutique biblique s’offre à nous à la fois comme appel et comme un défi. C’est un appel en ce qu’elle nous invite à réfléchir à ce que nous lisons et le méditer. C’est un défi en raison de l’étendue théorique et pratique du domaine, et des difficultés qui s’y rattachent. Par sa dimension évaluative de la manière d’interpréter les Écritures, elle est une responsabilité pour chaque génération. D’une part, nous ne pouvons pas sortir de notre époque ni la transcender. Le lecteur le sait déjà, nul ne pense sans le langage propre à sa génération. D’autre part, il est de notre devoir d’entrer aujourd’hui en dialogue avec les recherches léguées par l’Église d’hier, afin de réévaluer notre approche herméneutique actuelle, de nous réformer, et pour ne pas voir resurgir les anciennes hérésies. « Regagner une compréhension juste de l’Écriture, disait Emil Brunner, est aujourd’hui comme en tout temps la tâche la plus urgente, non seulement de la théologie, mais de l’Église en général »[7].
Objectifs
Art et science du comprendre, l’herméneutique est nécessaires pour bien interpréter les Écritures, que nous désirons comprendre en raison de l’importance de son message. Elle vise la recherche du sens, la compréhension de ce que le texte veut dire et veut nous dire. Jésus nous dit : « Vous étudiez avec soin les Écritures parce que vous êtes convaincus d’en obtenir la vie éternelle » (Jn 5.39). Les Écritures parlent de Jésus à qui l’apôtre Pierre à répondu : « Seigneur, vers qui irions-nous? Tu as les paroles de la vie éternelle » (Jn 6.68).
Par l’entremise de l’exégèse (nous expliciterons ce terme plus tard), la découverte de l’intention de l’auteur en constitue l’un des premiers objectifs. Milton S. Terry soulève, à ce titre, que l’herméneutique peut désigner la science d’interpréter le langage d’un auteur[8]. La compréhension du langage de celui-ci s’avère même nécessaire à une saine application; une saine exégèse servira de guide à l’interprète pour l’appropriation de ce que les premiers lecteurs devaient initialement comprendre. Pour ce faire, nous verrons plus tard comment transposer l’enseignement spécifique vers un enseignement plus général, applicable à notre époque. Comme le résume si bien Alfred Kuen, « l’interprétation biblique a pour but de déterminer la signification exacte de l’Écriture Sainte, c’est-à-dire de comprendre la pensée de l’auteur inspiré, ce qu’elle signifiait pour ses premiers destinataires et ce qu’elle veut nous dire aujourd’hui »[9]. « C’est une façon de lire un livre ancien de façon à en faire apparaître la pertinence pour l’homme moderne »[10].
L’apôtre Paul, dans l’épître seconde à Timothée, après avoir souligné que « Toute Écriture est inspirée de Dieu », précise qu’elle est « utile pour enseigner, pour convaincre, pour corriger, pour instruire dans la justice, afin que l’homme de Dieu soit accompli et propre à toute bonne œuvre » (2 Tm 3.16-17). Ce passage nous rappelle que ce n’est pas quelques livres de la Bible qui nous permettent de mener une vie juste, mais l’ensemble. Mais surtout, il nous rappelle que l’objectif, à la fin du processus herméneutique, est le passage de l’interprétation à l’application. Enfin, notre disciple nous permettra d’éviter de répéter les interprétations mauvaises du passé. Olivier O’Donovan en a déjà montré les dangers dans son livre où il explique que : « nous avons suffisamment d’éléments de preuve [provenant] de l’histoire des distorsions que l’Église encourt quand elle répond aux défis de façon circonstancielle, sans réflexion suffisante sur son propre caractère et sa mission »[11]. De même que la connaissance de l’histoire agit comme garde-fous, la reconnaissance de notre arrière-plan culturel agit pour nous sortir de mauvaises habitudes interprétatives. En prenant conscience de l’influence du monde sur sa pensée, l’herméneute pourra réformer son intelligence afin d’éviter de faire dire à la Bible n’importe quoi, au gré de la mode. Pour atteindre les objectifs que nous venons d’énumérer, soulevons maintenant les principaux défis de l’interprétation.
Difficultés et solutions
De la nécessité de l’interprétation
Les adversaires de l’étude exégétique du texte se demanderont sans doute : « Pourquoi se questionner sur l’interprétation? Plusieurs ne prétendent-ils pas comprendre la Bible sans l’interpréter, grâce à l’aide du Saint-Esprit? » C’est là une première difficulté que rencontrera l’herméneute contemporain, à savoir qu’un grand nombre croit ne pas avoir besoin de l’interprétation. Deux raisons principales, pourtant, nous invitent, voire nous obligent, à apprendre à interpréter. Premièrement, l’interprétation est un phénomène universel, omniprésent dans le langage. C’est tellement vrai que, notamment dans les discussions ordinaires, nous arrivons à comprendre même le sens de messages dont la grammaire n’est pas respectée, car nous déduisons intuitivement l’intention de l’interlocuteur, et que nous partageons, avec celui-ci, un monde ; nous interprétons dans et à partir de situations réciproques. Il suffit qu’une difficulté communicationnelle survienne pour prendre pleinement conscience de ce phénomène, comme lorsque la lecture de passages difficiles nous force à trouver des solutions de compréhension. Bien que pour certains auteurs, dont Ernesti et Schleiermacher, l’interprétation ne concerne que les passages difficiles, elle n’est pas seulement requise, elle s’applique tout le temps, car nous abordons toujours le texte à partir d’idées préconçues qui forment le point de départ de notre interprétation. L’interprétation a une fonction de médiation entre un émetteur et des récepteurs. Elle est la condition de communication du message. Cette fonction médiatrice s’applique même à ce que nous appelons l'interprétation musicale ou théâtrale : l’interprète est médiateur entre l’œuvre (du compositeur ou du dramaturge) et le public[12].
Deuxièmement, l’interprétation est nécessaire à cause de la nature des Écritures. En effet, des difficultés apparaissent parce que la Bible est composée de plusieurs textes, rédigés selon différents genres littéraires, et qu’elle rassemble des textes anciens, écrits dans des langues et des cultures différentes, difficilement compréhensibles pour des lecteurs contemporains. En réponse à ceux qui pensent que l’interprétation n’est pas universelle, nous pouvons d’abord souligner quelques passages de la Bible où l’auteur fait référence à des peuples ou à des villes étrangers. Dans ce cas, le sens ne peut être identifiable que par connaissance historique préalable. Ensuite, il y a le fait que la Bible que nous lisons est traduite. La traduction n’est pas une mauvaise chose en soi. Au contraire, cette pratique érudite a pour objectif de faire comprendre le message au lecteur contemporain. Toutefois, pour y parvenir, le traducteur opère des choix selon son interprétation. Pour ceux qui ne parlent pas le grec, l’hébreu ou l’araméen ancien, la médiation d’un langage plus moderne travaille déjà en leur faveur. Enfin, il suffit de reconnaître que les technologies ont changé, pour avouer que nous avons besoin de nous questionner sur les moyens de parvenir à la bonne compréhension. En somme, c’est parce que nous ne partageons ni les langues ni les expériences des auteurs et des premiers lecteurs de la Bible (notre monde étant bien différent du leur) qu’il nous est primordial de développer une herméneutique légitime. Comme le dit si bien Georges Ladd : « la Bible est la Parole de Dieu donnée en paroles humaines dans l’histoire ». Cette cursivité de la Bible, c’est-à-dire le fait qu’elle possède deux types d'auteurs, Dieu et les hommes, nous oblige à l’interpréter avec une éthique responsable, autrement dit avec tous les moyens humains et divins dont nous disposons. L’herméneute cherchera donc à utiliser toutes les ressources (littéraires, philosophiques, etc.) disponibles pour bien interpréter la Parole de Dieu.
De la faillibilité de la méthode
Comme nous venons de démontrer l’importance de se poser des questions sur l’interprétation, répondons d’emblée à celle-ci : en herméneutique, existe-t-il une méthodologie infaillible? Pour répondre à cette question, nous devons nous rappeler que malgré l’infaillibilité de l’Écriture, l’interprétation demeure faillible. Certes, les méthodes peuvent nous assurer de saisir un grand nombre de passages. Néanmoins, comme nous voyons au travers d’un miroir, nous dit la Bible, notre connaissance reste partielle jusqu’au retour de Jésus-Christ. Les différences d’interprétation résultent du système théologique et des méthodes, qui parfois ne sont pas bonnes ; c’est toujours sur de mauvaises interprétations de l’Écriture que s’appuient les hérésies[13]. Alors, comment créditer ou discréditer les différentes approches herméneutiques? Pour ce faire, nous devons déterminer l’autorité du texte biblique. Nous croyons que l’autorité de la Bible relève d’elle-même et qu’il ne faut pas lui imposer de critère de l’extérieur ni de principe externe. Par exemple, nous nous opposons au littéralisme, car c’est extra-bibliquement que les tenants de cette doctrine assument qu’il ne faille lire la Parole de Dieu que littéralement. Ce qui nous autorise à revendiquer l’autorité tautologique de la Bible, c’est le principe de l’autoprésentation de l’Écriture. Une fois que nous sommes prêts à accueillir la Bible, et son message, dans toute son importance, c’est-à-dire comme Parole de Dieu, nous devons reconnaître qu’elle régit elle-même sa propre interprétation.
L’analogie de la foi
L’apparente contradiction entre certains passages est une autre difficulté. Mais elle n’est pas sans solution. Lorsque deux enseignements semblent s’opposer, il faut passer à l’étape de la synthèse au nom du principe de l’analogie de la foi : l’Écriture interprète l’Écriture. La Bible n’est pas contradictoire, car Dieu en est l’Auteur et il ne peut se contredire. Ainsi, la théologie systématique doit, par exemple, tenir compte à la fois des enseignements de Paul, de Jacques et de l’auteur de l’Épître aux Hébreux, pour en dégager une doctrine non contradictoire. De même, les passages difficiles doivent être éclairés par des passages faciles à comprendre. Les passages doctrinaux ont donc priorité sur les passages qui relèvent de la métaphore, de l’image, du récit, de la poésie, etc.
La distance historico-culturelle
Entre les auteurs bibliques et nous, il y la distance historico-culturelle. Nous en prenons conscience lorsque nous tombons sur des noms propres, de personnes ou de lieux qui nous sont étrangers. De même, les références à des pratiques, des usages ou des conventions nous sont difficiles à comprendre, contrairement aux premiers destinataires, parce qu’il nous manque l’arrière-plan culturel. Un voyage dans le temps intellectuel s’impose alors pour retrouver celui-ci. « Déchiffrer l’Écriture, c’est déchiffrer le témoignage de la communauté apostolique »[14], explique Ricœur. Ainsi, la « distance historique » requiert-elle que nous acquérions une connaissance préalable, celle que le destinateur et les destinataires partageaient pour comprendre le message. Nous devons revêtir les mentalités de l’époque. Il faut s’informer sur l’arrière-plan de celle-ci et le substituer au nôtre. Si l’on en respecte les modalités de compréhension, la distance historico-culturelle n’est pas un empêchement à la juste interprétation. Cependant, il ne faut pas penser que l’histoire ne fasse qu’obscurcir le sens des textes étudiés ; souvent elle le clarifie ! C’est ce que Gadamer appelle la Wirkungsgeschichte, c’est-à-dire le « travail de l’histoire ». Par exemple, la doctrine de la justification par la foi des Réformateurs éclaire le texte depuis des siècles. De même, la doctrine de l’inerrance, qui dit que tout ce que la Bible dit est vrai, est une attitude qui facilite compréhension de l’Évangile. En fait, une attitude de confiance devant la Parole de Dieu et son Évangile, telle que portée par la tradition, n’a aucune conséquence négative. Au contraire, certaines attitudes, qui refusent le message au nom de l’empirisme, par exemple, nuisent au Kérygme.
Le sensus plenior
Parfois, un auteur inspiré se permet de sortir un texte de son contexte pour l’interpréter dans un sens nouveau. Cependant, c’est exclusivement sur la base de l’autorité du Saint-Esprit, qui seul a l’autorité de vouloir un sens plus complet (au-delà de l’intention de l’auteur), qu’il peut le faire. Pour désigner ce deuxième sens d’un même passage, les théologiens parlent d’un sensus plenior (plein sens). Étant donné que celui-ci relève toujours de l’inspiration, il est interdit au lecteur de passer par dessus les règles de l’exégèse à la manière des auteurs inspirés que le Saint-Esprit a autorisés à déterminer un second sens. Même un lecteur éclairé ne peut le faire. Autrement, il s’autorise lui-même à sortir de l’orthodoxie (la croyance correcte), et de l’orthopraxis (l’action correcte). Selon Fee et Stuart, la possibilité d’un sens second, inspiré par le Saint-Esprit, et que l’auteur ou ses lecteurs n’auraient pas perçu, dépasse le cadre de la stricte exégèse[15].
Acquis de l’herméneutique
L’héritage historique
Selon le récit d’Actes, au tout début de l’Église, seul l’Ancien Testament (Ancienne Alliance) formait la Bible. La société considère le christianisme comme une secte juive ou comme une branche messianique du judaïsme (les messianiques croyant que le messie est venu). Minoritaire, la pensée chrétienne ne bénéficie pas encore de la reconnaissance du monde de l’époque. Dans les années 30-40, les chrétiens disposent, par transmission orale, des enseignements de Jésus et des apôtres. Progressivement, ils accèdent aux lettres écrites sous l’autorité des apôtres. En raison du temps nécessaire pour les copier et les rassembler, les premiers écrits apostoliques, probablement les évangiles et les lettres de Paul, ne sont rassemblés qu’au deuxième siècle. Toutefois, les enseignements oraux continuent de circuler : il y a très peu de traités théologiques.
Les Pères de l’Église
Plusieurs acquis théologiques proviennent de la lutte des Pères de l’Église contre le paganisme. Nommés ainsi pour avoir été très près des apôtres, les pères apostoliques, comme Clément de Rome et Polycarpe, s’attaquent aux problèmes doctrinaux qu’ils rencontrent. Orthodoxes, ils reconnaissent l’Ancien Testament. L’une des plus grandes difficultés consiste à défendre l’Ancienne Alliance comme Parole de Dieu et à la lumière des enseignements du Christ, tout en montrant à la fois la légitimité de cette interprétation, si radicalement distincte de la croyance des autres juifs, et l’illégitimité des branches anti-messianiques du judaïsme. On s’efforce de montrer que le Christ a accompli ce qui était annoncé.
L’intégration progressive de croyants païens avait déjà conduit à la querelle, à la fin des années 40 et 50, que les épîtres de Paul abordent, concernant le rapport entre les lois judaïques et le christianisme. Les écrits de Paul, comme celles de Pierre et de l’Apocalypse, répondent à la question suivante : les païens doivent-ils judaïser? La réponse des apôtres fournira les fondements doctrinaux dont les Pères de l’Église se serviront pour interpréter l’Ancien Testament. Clément de Rome, helléniste de formation, connaissait l’hermétique juive. Comme Paul, il montre que l’interprétation messianique est justifiée, ce qui ne va pas de soi dans le contexte de l’Église primitive. Les vérités chrétiennes sont aussi attaquées par les philosophies païennes dont le gnosticisme, sorte de philosophie populaire qui a pris des allures de religion et dont l’idée est que la connaissance seule sauve. Les adeptes de cette doctrine cherchent à se libérer de la matière qu’ils voient d’un mauvais œil. Marcion, que l’on rattache aussi au pneumatisme et au charismatisme ancien, est le plus connu de ceux qui ont fini dans le gnosticisme. Il entraînera beaucoup de fidèles.
La responsabilité des chrétiens à se situer par rapport à ce courant de pensée amènera plusieurs penseurs à défendre le christianisme pour protéger les brebis du ravin de la philosophie païenne. Ignace et Irénée de Lyon parleront des autorités institutionnelles de manière à défendre la tradition orale et écrite, dans leur lutte contre les hérésies. Pour savoir que l’interprétation et les critères sont bons, on se soumet à la règle de foi : l’interprétation adéquate provient de ceux qui nous transmettent la Parole de Dieu. L’interprétation doit rester commune : on fait un tri objectif entre ce qui est interne et ce qui est externe. Alors que les hérésies cherchent à faire des divisions, la catholicité sert de principe régulateur. L’importance est d’abord accordée à ce que nous avons reçu. Les Pères de l’Église essaient ainsi de bâtir leurs doctrines sur une interprétation qui manifeste l’universalité de l’église. Selon cette démarche holiste ou intégrée, la théologie ne doit pas s’isoler, mais suive les lignes normales, le cadre catholique d’interprétation, la Paradosis, c’est-à-dire ce qui a été donné, délivré. Dans la tradition, nous sommes un maillon de la chaîne de la réception et de la transmission de la vérité. C’est pour cela que le rôle des apôtres, qui sert de lien entre l’enseignement de Jésus et les communautés croyantes est fondamental.
En plus de la règle de foi, les principes fondamentaux qui, faisant d’une pierre deux coups, serviront à combattre les hérésies et à fortifier la foi des chrétiens sont l’analogie et l’exigence de la foi. L’analogie de la foi, comme nous l’avons dit précédemment, se base sur la doctrine selon laquelle la Bible s’éclaire d’elle-même, parce qu’elle a un Auteur absolu. Il sert à harmoniser les textes en éclairant les passages obscurs par ceux qui sont clairs. Cet holisme herméneutique est la contribution d’Irénée. L’exigence de la foi, quant à elle, rappelle qu’il faut la foi pour comprendre et pour interpréter correctement la Bible. Augustin disait : crois pour comprendre ; comprends pour croire.
De la lutte des Pères de l’Église contre le paganisme proviennent bien d’autres acquis théologiques que nous ne pouvons nous permettre de voir pour l’instant.
La Réforme
La Réforme est le moment de l’histoire où l’herméneutique se cristallise. Le principe du sola Scriptura (par l’Écriture seule) y devient le principe par excellence pour la compréhension de la vérité. La Bible est alors considérée comme l’autorité finale en ce qui concerne la foi et la vie, la Parole écrite de Dieu, fondement ultime et absolu du chrétien[16]. En prônant un appui immédiat sur la Parole, il s’oppose à l’appui absolu et autoritaire sur les magistères pour la compréhension des choses célestes. Qu’il n’y ait pas de révélation en dehors de la Parole de Dieu ne veut pas dire que le Seigneur ne peut pas se manifester ailleurs que dans le texte, de manière individuelle par exemple. Mais une telle manifestation ne se sera jamais en contradiction avec l’Écriture, ne la remplacera jamais et ne prendra le dessus sur elle. Or, un grand nombre de spiritualistes croient que l’interprétation passe directement par le Saint-Esprit, sans médiation des Écritures. Pourtant, le ministère du Saint-Esprit est d’ouvrir notre intelligence, de nous éclairer les Écritures, non de nous inspirer de nouvelles révélations (les derniers mots de l’Apocalypse sont clairs à ce sujet). Il joue le rôle de la lumière qui dissipe l’obscurité pour nous permettre de voir ce qui est déjà là.
La méthode historico-grammaticale, autre fruit de la Réforme, insiste sur le fait que le texte biblique est ancien : il faut le comprendre historiquement et grammaticalement. On s’intéresse contextuellement à la Bible dans sa forme finale en langues originales. Les réformateurs, Luther, Zwingli et Calvin, encouragent la traduction de la Bible dans les langues vernaculaires (langues du peuple), pourvu que le traducteur reste fidèle au message du texte original. Pour les Pères du protestantisme, en plus d’être possible, la compréhension est nécessaire pour avoir accès à la vérité.
Contre la théologie d’Érasme de Rotterdam (première édition du Nouveau Testament), qui croyait que la Bible pouvait être interprétée de multiple manière et que nous ne pouvions pas savoir laquelle était bonne, Luther se méfie de l’autonomie de la raison humaine, du magisterium ecclésiastique et de l’illuminisme (les illuminés pensent que la vérité divine leur provient directement du Saint-Esprit sans passer l’Écriture ou son étude). Il milite en faveur de la démocratisation de l’interprétation de la Bible, de l’indépendance vis-à-vis des magistères de l’accès à la vérité biblique. Cela n’implique pas que nous rejetions les théologiens. Nous avons besoin quand même des traducteurs, des explicateurs, etc., mais ceux-ci agissent de manière ministérielle et non magistérielle. Pour lui, il n’y a pas deux catégories de gens, tous peuvent comprendre, contrairement à l’approche magistérielle très allégorisante.
Le principe de la perspicacité de la Bible amènera Luther à rejeter le principe du sens multiple des Écritures que ces prédécesseurs, qui considéraient obscure la Bible, ont développé au Moyen Âge en affirmant que l’interprétation devait passer par une caste ecclésiastique. En considérant l’unicité de la Bible comme Parole de Dieu, le réformateur allemand rejette l’idée selon laquelle le Pape en serait l’interprète suprême, voir la remplacerait. C’est la Bible qui est la norme normante (norma normans), de même qu’elle est plénière (totalement inspirée par Dieu) et verbale (ce qui est inspiré passe par le langage). L’une des conséquences de ce principe de clarté des Écritures pour la théologie sera la réaffirmation de la suffisance de l’Écriture en tant que son propre interprète (c’est l’Écriture qui est notre magistère). Les ministres de la Parole doivent aider et non interpréter celle-ci à la place et au-dessus des lecteurs.
En somme, la Réforme a développé l’interprétation grammatico-historique, les principes du sola Scriptura et de la perspicacité des Écritures, le rapport Bible-tradition, ainsi que le modèle classique d’interprétation que nous allons voir ci-dessous. L’approche réformée de l’interprétation se caractérise par les prédicats suivants : par la foi seule, par la grâce seule, par le Christ seul et par l’Écriture seule et pour la gloire du seul Dieu. L’Écriture est suffisante !
Modèles d’interprétation
Le modèle classique
Dès la Réforme, la bonne compréhension des termes bibliques emprunte trois étapes : l’exégèse, la synthèse et l’application. Traditionnellement, le modèle d’interprétation comprend les actions de comprendre, de faire la synthèse et de mettre en application. Cependant, si nous pouvons distinguer ces étapes, nous ne pouvons jamais les séparer les unes des autres. L’application est impliquée dans la compréhension. On fait l’exégèse parce qu’on veut comprendre, et on veut comprendre parce qu’on est impliqué, que ça nous importe. Une connaissance qui n’est qu’intellectuelle est inadéquate, voire inintéressante.
L’exégèse
L’exégèse une l’activité d’investigation ayant pour objectif la compréhension d’un texte ou d’un discours. Académiquement, elle concerne les manuscrits anciens et de cultures étrangères. À la manière d’un détective, l’exégète recherche le sens objectif du message. La signification dépend de l’auteur et des conditions d’émission. Sa quête vise l’intention originale de l’auteur et par le fait même celle du Saint-Esprit qui l’a inspiré. Cette intention, les destinateurs pouvaient, à l’origine, la comprendre grâce à leur familiarité avec leur arrière-plan sociohistorique. L’objectif de l’exégèse est faire ressortir exactement ce que le destinateur du message voulait faire comprendre à ses destinataires. Le principe de l’analogie de la foi ne nous autorise pas à déduire, chez les destinataires originaux, une compréhension du message en dehors de leur propre contexte historique. Ce principe n’exclut pas que l’auteur réinterprète des images ou des symboles vétérotestamentaires, tel que nous l’avons vu avec la notion de sensus plenior.
De plus, l’exégèse étudie la structure du texte. Poser les bonnes questions au texte est nécessaire[17]. Un texte dans la Bible n’est pas autonome : il a son contexte, son endroit attitré. Son sens est lié à son auteur, qui s’adresse à un public cible ; il a ses conditions d’émergence. Chaque livre est structuré, provient d’un monde et constitue un ensemble canonique. Contextuellement, les détails servent l’ensemble qui, à son tour, sert les détails. Cette une étape importante de la compréhension, qui commence par une reconstitution du contexte historique constituant l’arrière-plan du texte, et qui vise la synthèse et l’application.
Sommairement, les exigences fondamentales de l’exégèse sont : 1) présence du texte (monde du texte) ; 2) le respecter la double nature de la Bible, à la fois Parole de Dieu et paroles d’hommes (monde de l’auteur) ; 3) la mise en pratique du texte (monde du lecteur).
La synthèse
Le sens du message biblique doit devenir sens pour nous. Ainsi, le sens doit être intégré à notre vision du monde pour la renouveler, la réformer (semper reformanda). Systématique, cette vision du monde procède de l’analogie de la foi, dont nous avons déjà parlé. Pour le dire autrement, la synthèse est une sorte de méditation sur les vérités issues de l’exégèse.
L’application
Il est très important de comprendre que l’application nous aide concrètement dans notre exégèse. Car il est impossible de traiter adéquatement les questions d’interprétation de manière abstraite, sans encrage dans des situations réelles. La pratique influence la théorie et vice-versa. Tantôt, une mauvaise application nous révèle une mauvaise compréhension, tantôt c’est celle-ci qui provient d’une application erronée. C’est là qu’apparaît ce que Grant Osborne désigne par « la spirale de l’herméneutique »[18], c’est-à-dire l’interaction, sous forme d’aller-retour, entre l’exégèse, la synthèse et l’application. Qu’il faille croire pour comprendre et comprendre pour croire est l’une des spires de cette spirale. Plus précisément, « pour comprendre le texte, il faut croire en ce que le texte m’annonce ; mais ce que le texte m’annonce n’est donné nulle part ailleurs que dans le texte ; c’est pourquoi il faut comprendre le texte pour croire »[19]. Ce n’est pas un cercle vicieux, car il y a progrès : nous relisons et corrigeons certaines erreurs. Ne comprenons qu’il nous faut être bien disposé pour bien interpréter ; notre attitude peut nous aider ou nous biaiser. Il faut régler, si c’est le cas, les problèmes que nous avons envers l’auteur.
Le modèle de la communication
En 1963, Roman Jakobson publie son Essai de linguistique générale. C’est une avancée considérable pour la théorie de la communication. Son modèle pose les fondements essentiels du phénomène de la communication, quels qu’en soient les agents. Le modèle de base comprend : l’émetteur (destinateur : concevoir, contenu, manière de communiquer, anticipation du destinataire, il réfléchit au message, au cadre, il le transmet), le message (il prend un code, il doit être verbal ou verbalisable, il est référentiel, car on parle de quelque chose), et le récepteur. C’est l’émetteur qui a le privilège du message. C’est lui qui a la charge de choisir et respecter le genre littéraire. Il a la responsabilité de bien l’encoder.
Le message relève du contexte, de l’arrière-plan commun ; puisque les locuteurs passent par un cadre préalable de connaissance, tout n’est jamais explicité, une partie seulement l’est – trop d’explicitation est même néfaste. Il dépend aussi d’un contact entre les locuteurs. Pour qu’il y ait communication, il faut un canal, un médium.
Le destinataire doit reconnaître qu’il n’est pas l’émetteur du message, il n’est que le récepteur. Le récepteur, idéalement, veut intégrer les vérités, les faire siennes. Par exemple, la Parole de Dieu change et transforme par la vérité. La vérité nous rend libres. Elle nous affranchit, car c’est ce qui nous définit. C’est la raison pour laquelle nous pouvons affirmer que la lecture biblique nous transforme.
Enfin, Jakobson parle du bruit dans la communication; ce sont les éléments externes qui font obstruction à la réception et à l’interprétation du message. Ceux-ci peuvent être physiques ou psychiques (la tradition, les mensonges, etc.).
Le modèle du triple monde
Le monde de l’auteur
Ce n’est pas tant la psychologie de l’auteur qui constitue son monde, mais surtout son cadre sociohistorique. L’intention de l’auteur se retrouve dans le texte. S’il est sage, le destinateur se met au niveau du destinataire, il s’inquiète de la réception de son message.
On parle de la concursivité ou coopérationnalité de la Bible pour dire que la Bible a un Auteur divin au-dessus d’auteurs humains. Dieu travaille à l’intérieur de l’être humain sans enlever les capacités de ce dernier. Bien plus, il permet aux auteurs humains de s’exprimer en tant qu’humain libéré du péché. Nous n’avons pas une conception de l’inspiration comme les musulmans : dans celle-ci, le texte est comme descendu du ciel, d’où le fait que le Coran ne se traduit pas. Dans la conception biblique, Dieu ne fait pas tomber le texte du ciel. Dieu œuvre à travers les auteurs humains, sans que leur volonté ne soit automatisée ; les auteurs humains sont libres plutôt que d’être des sténographes écrivant l’audible Parole de Dieu : ils réfléchissent, ils construisent le texte, se corrigeant eux-mêmes en cours de rédaction, etc. Étant donné qu’un bon communicateur prend en considération le récepteur, Dieu nous parle homme. Il se met à notre portée. L’interprétation est donc possible pour nous, car Dieu nous parle comme une nourrice parle à ses enfants, pour reprendre l’image de Calvin. Cela ne veut pas dire que nous ne devons pas prendre les moyens nécessaires à la pleine compréhension de notre héritage.
Le monde du texte
Un texte projette un monde. Il n’est pas qu’un ensemble de phrases ; bien qu’il soit construit selon le genre littéraire prévu par l’auteur, et soumis aux lois de la communication linguistique, grammaire, syntaxe, etc., il n’y a pas que la structure syntaxique qui importe, mais aussi la sémantique. Le monde du texte c’est, au minimum, le message fondamental. C’est pour cela que la traduction est possible, car le traducteur ne transmet pas d’abord la syntaxe, mais le sens.
Le monde du lecteur
Pour faire de l’interprétation, il faut un interprète. Dans des conditions idéales, c’est-à-dire celles des contemporains de l’auteur, la lecture du texte suffit. Comme nous l’avons vu, que nous soyons détachés du monde de l’auteur implique un effort de notre part pour, d’une certaine manière, s’y rattacher. Mais ce n’est pas la seule condition d’une bonne interprétation. Pour comprendre la Bible, il faut certaines prédispositions spirituelles : être né de nouveau ; croire que la Bible est la Parole inspirée de Dieu ; associer lecture de la Bible et prière. De même que le lecteur devra s’assurer d’être spirituellement bien disposé, certaines conditions intellectuelles sont préalables : employer son intelligence ; ne pas craindre l’effort ; aller du simple au complexe ; garder l’esprit ouvert[20]. Lorsque nous lisons la Bible, nous ne sommes pas là pour être créatifs. Le chrétien immature cherche à combler ses propres besoins. Le chrétien mature cherche à comprendre ce que Dieu dit. Cela dit, la vérité n’est pas abstraite. Le lecteur n’a pas la liberté de l’auteur, mais la responsabilité d’un observateur bienveillant. Le lecteur est toujours second par rapport au texte. D’abord, il n’était pas présent à l’origine de la création de la Bible ; il doit essayer de la comprendre telle qu’elle se présente. Le texte s’accompagne de son propre code. Essayer de comprendre la Bible en négligeant sa forme s’avère aussi absurde que de lire de la poésie de manière strictement littérale. Si nous ne sommes pas au courant des pratiques de l’époque, il est de notre devoir de s’informer sur les pratiques sous-entendues par le message. L’inconditionnel de la compréhension est de se soumettre au monde du texte. Par exemple, si je ne crois pas à la transcendance et que je lis un texte qui le sous-entend, je dois, comme lecteur, accepter que le texte ait sa propre vision du monde, que je sois ou ne sois pas d’accord avec cette vision.
Notre manière habituelle d’interpréter provient souvent de notre héritage. Nous lisons toujours à partir d’un monde, des préjugés, une tradition, etc. Nous devons en prendre conscience pour en minimiser les impacts négatifs. Nous ne pouvons pas ne pas avoir de préjugés du tout. Nous sommes malheureusement dans une société qui nie avoir des préjugés. Pourtant, il a de très bons préjugés, dont celui de l’existence de Dieu. Les pires gens sont ceux qui disent ne pas avoir de tradition. C’est la tradition qui nous a formées et qui nous porte. Il y a des vérités dans nos traditions. La société aussi influence notre interprétation. L’herméneute doit donc examiner les forces, les marques distinctives de notre tradition, de notre histoire, et les confronter à la Bible. Rappelons-nous que nous avons appris le Christ à travers des gens et ces gens l’on apprit de la Bible et de l’Église. Il ne faut pas nécessairement être désintéressé pour mieux comprendre. Souvent c’est l’intérêt du lecteur qui favorise le mieux sa compréhension de l’écriture. La foi est la meilleure disposition que nous pouvons avoir vis-à-vis la Bible. Mais cela n’est pas au diapason de l’esprit rationaliste. La démythologisation n’est pas une lecture de la Bible ; c’est un rationalisme propre à notre monde, mais qui n’est pas propre au monde du texte. La connaissance la plus appropriée se fait dans une attitude d’amour. L’amour nous pousse à bien comprendre, sans distorsion. La bonne attitude de lecture à adopter devant la Bible est réceptive et respectueuse. Aristote dans la Rhétorique disait déjà : « la disposition de l’auditeur importe davantage pour le procès ; car les choses ne paraissent pas les mêmes à qui aime ou qui hait, à qui éprouve de la colère ou est dans un habitus de calme… »[21]. Djaballah rappelle que le lecteur doit reconnaître l’autorité de ce dont il est déjà informé, s’il veut avoir accès à de nouvelles connaissances bibliques.
Pour étudier la Bible adéquatement, le lecteur doit aussi apprendre à concilier diverses approches ou attitudes vis-à-vis le texte. Tantôt quelques recherches peuvent être très approfondies et n’aborder que quelques mots, tantôt c’est une épître complète qui est objet de dissertation. Parfois, c’est la lecture méditative qui s’impose, parfois c’est une lecture qui s'informe systématiquement. De la même manière que l’interprétation doit concilier les trois mondes, il faut pratiquer les différentes approches de lecture. La sensibilité à la modalité des passages eux-mêmes est de mise lorsqu’il est temps de choisir l’attitude d’interprétation nécessaire. En effet, les paroles de la Bible peuvent ne pas s’adresser directement à nous, mais à Dieu, comme dans plusieurs passages des psaumes.
Enfin, nous croyons que l’être humain est dépendant de Dieu pour son interprétation qu’il le veuille ou non. « Le Juge suprême par qui tous débats religieux doivent être réglés, par qui toutes décisions des Conciles, toutes opinions des Pères, toutes doctrines humaines et toutes manières de voir particulières doivent être examinées, et à la décision duquel nous devons nous remettre, c'est le Saint-Esprit parlant par l'Écriture; et nul autre », déclare la Confession de Westminster, en s’appuyant sur Matthieu 22.29-31, Éphésiens 2.20 et Actes 28.25.
Dangers de l’herméneutique
Pour certains, la Bible peut devenir la caverne d’Ali Baba. Dans l’histoire, Ali Baba, pauvre bûcheron, entend le chef d’une bande de voleurs prononcer la formule magique « Sésame ouvre-toi » pour ouvrir la porte d’une grotte. Une fois les quarante voleurs repartis, il prononce les mêmes mots pour y découvrir un gigantesque trésor. À la manière du personnage de l’histoire, certains lecteurs cherchent des formules magiques pour découvrir des trésors dans la Bible. L’herméneutique comporte plusieurs dangers que nous voudrions survolés sous forme de mise en garde à l’herméneute qui voudrait bien les éviter.
Attention à l’ethnocentrisme qui consiste à croire que les Écritures ont d’abord été rédigées pour des lecteurs d’aujourd’hui. Puisqu’il s’agit de textes anciens, ce ne sont pas les normes et valeurs propres à notre société qui sont propres à l’analyse des sociétés sous-entendues par la Bible. Attention au respect du canon. Plutôt que de déplacer le texte hors de son contexte ou de faire preuve de sélectivité, de fausse combinaison ou de redéfinition, il faut considérer le texte comme il se présente, car nous présupposons que la Bible est la Parole de Dieu transmise par le moyen de paroles humaines. Pour nous, cette Parole se présente canoniquement, de sorte que c’est l’unité qui donne son sens aux éléments de l’ensemble. Attention aux autorités extra-canoniques. Nous savons, en conformité avec le principe du sola Scriptura, que l’Écriture relève de sa propre autorité. On ne doit pas, comme l’Église au Moyen ge, soumettre l’interprétation à l’autorité dictatoriale des magistères. La littérature secondaire est indispensable, mais il reste qu’elle n’est pas inspirée. Attention au psychologisme ; certains aujourd’hui dans le monde évangélique disent que comprendre Dieu c’est se comprendre soi-même. Il est à la mode de vouloir ne comprendre que soi-même. Bien qu’une application pour soi s’applique dans certains cas, il ne faut pas oublier qu’il y a une compréhension de l’auteur comme autre.
Attention à la manipulation (volontaire ou involontaire) et à l’auto-séduction, comme lorsque nous ne cherchons que des messages positifs de la part de Dieu. Si tous les messages de la Parole me caressent dans le sens du poil, c’est un indice de méprise, selon les Pères de la réforme. C’est, entre autres, à cause de ce type d’attitudes que les maîtres du soupçon accusent l’église d’asservir les gens : Marx, Nietzsche, Freud. Il n’y a pas de doute que certaines églises l’ont fait. Or, nous ne voulons devenir de mauvais témoins.
Attention à l’intellection, au gnosticisme (la doctrine comme vérité ultime). C’est le texte biblique qui est la Parole finale. Il faut se remettre en question et accueillir, et consolider les vérités. L’interprétation n’est pas seulement intellectuelle ou gnoséologique, mais sont impliquées la volition et l’émotivité, la motivation doit être là. Les récepteurs entendent, mais ne comprennent pas. Ils sont en rébellion. Attention au docétisme. L’hérésie désignée par ce terme relève du courant théologique sarx (mot grec pour chair), dont les adeptes refusent de croire à l’humanité du Christ. Pour ces docètes, la crucifixion n’a pas réellement eu lieu, car la chair de Jésus ne serait qu’aspectuelle, sans réalité objective.
Attention à l’allégorisation. C’est un danger que même les Pères de l’Église, malgré leur grande connaissance (Origène a traduit la Bible en six langues), n’ont pas su éviter. Luther, dans La captivité babylonienne de l'Église, écrit que les paroles de l'Écriture « doivent être retenues dans leur signification la plus simple. À moins que le texte ne l’exige manifestement, elles ne doivent pas être comprises à l’encontre de la grammaire et de leur sens propre »[22]. Le théologien l’a dit, nous l’avons dit et nous le répétons : la Bible est claire. Attention au subjectivisme. Il est à la mode de déplacer complètement le poids de la signification sur les épaules du lecteur. La Bible n’a pas été écrite avec cette intention. Si lire une bande dessinée à la manière d’un journal ne fait pas de sens, pourquoi lire la Bible selon les aléas de notre subjectivité? En réponse au subjectivisme post-moderne, il importe de défendre l’objectivité textuelle. Il en est ainsi parce que même la polyvalence s’avère toujours limitée. Pour qu’il y ait sens pour le lecteur, il faut que l’auteur l’ait déterminé par « la médiation d’un texte rationnellement construit»[23]. Cette question de l’objectivité du sens ne peut être complètement développée pour l’instant.
Attention à l’« objectivisme ». Paradoxalement, les auteurs contemporains, même s’ils s’attendant à ce que le lecteur lise leur écrit selon leur intention (indiquée), remettent en question le rôle de l’auteur dans la détermination de ce qu’un texte veut dire. Un grand nombre de théories de l’interprétation récentes, dans le sillage de la proclamation de la mort de Dieu, vante la disparition de l’auteur. Ces théoriciens, qui nagent en pleine indétermination sémiotique, s’attaquent, de par leurs présuppositions, à l’unicité sémantique de la Révélation divine et à son Auteur par excellence. Néanmoins, la détermination du Texte étant intrinsèquement liée à l’intention de celui-ci, nous verrons plus loin qu’il y a correspondance entre le sens humain et divin. Que nous focalisions notre attention sur l’auctorialité du texte pour le comprendre n’implique aucune atteinte à la liberté et responsabilité du lecteur ni à la richesse et profondeur de ce qui est lu.
Attention au scientisme et au rationalisme. Il y a un réel danger à n’opérer que selon le modèle des sciences naturelles. La méthode scientifique risque de servir d’autorité au-dessus de la Parole de Dieu. Il faut rejeter la lecture rationaliste, mais pas la rationalité de la Bible[24]. Certains penseurs, comme Jean Zumstein, après Bultmann, imposent axiomatiquement le présupposé, selon lequel le caractère d’objectivité scientifique de l’exégèse exigerait une attitude antithéiste de la part du récepteur (lecteur, auditeur, on pourrait même ajouter regardeur), pour en déduire qu’une interprétation littérale est erronée si le récit raconte des miracles ou soutient une intervention de Dieu sur terre[25]. Attention au relativisme, au réductionnisme et à l’autonomisme. Si nous disons que l’interprétation est nécessaire, n’allons-nous pas tomber dans le relativisme (il n’y a pas d’absolu, tout est équivalent, c’est ta vérité, tout est valable) ou le réductionnisme selon lequel tout serait interprétation? Ces deux dangers nous guettent. Cependant, comme nous l’avons dit, l’interprétation est universelle. L’interprétation ne doit pas être comprise comme signification individuellement autonome. La Bible n’est pas neutre. Elle ne fonctionne pas de manière objectiviste. Elle se présente selon son point de vue. Il y des interprétations vraies, qui sont accessibles par la mise en œuvre directement ou indirectement des critères historiques ou de l’expérience qui nous aide discréditer les fausses interprétations. Comme interprète nous ne créons pas la réalité que nous cherchons à connaître. Il nous faut porter la réalité au langage et l’articuler pour la connaître.
Attention au mysticisme. « Dans le mysticisme, où la lettre et l’Esprit sont séparés, on ne peut jamais savoir avec certitude si la foi met en contact avec Dieu ou avec d’autres Esprits »[26]. Attention à la bibliolâtrie. Les libéraux accusent les chrétiens de déifier la Bible et de l’adorer comme réalité ultime. Or, la Bible n’est pas la finalité, elle est à propos de Dieu. Elle concerne les réalités importantes que nous voulons connaître pour des raisons essentiellement pratiques, voir éthiques. Elle est à propos d’une réalité extralinguistique. Elle ne communique pas simplement de l’information ou seulement de la doctrine. Les psaumes, par exemple, s’expriment dans un langage plus doxologique que doctrinal.
Attention au conformisme ou à l’anticonformisme. Parmi les plus grandes tentations qui guettent le théologien évangélique se trouve l’imitation des autres systèmes ou, au contraire, l’opposition symétrique à ces systèmes en tombant dans l’obscurantisme. Ainsi, que le sens d’un texte dépasse toujours l’intention de l’auteur est une idée gadamérienne qu’il faut remettre en question. Il faut critiquer aussi l’idée ricœurienne de l’autonomie sémantique du texte vis-à-vis de son créateur. Ricœur va jusqu’à dire que le texte est indépendant non seulement de son auteur, mais aussi de son propre monde.
Conclusion
En guise de synthèse, nous avons décidé de rappeler quelques principes pratiques, que Djaballah expose dans le cours d’herméneutique, pour nous qui voulons nous engager sur la voie d’une herméneutique biblique, entendu que la biblicité de l’herméneutique suggère à la fois l’interprétation de la Bible et les interprétations effectuées selon les exigences et les normes de la Parole de Dieu. Premièrement, nous pratiquons l’exégèse et non l’eisegèse[26]. Nous devons donc trouver, découvrir, dégager le sens du texte, voulu par l’auteur, au lieu de chercher des passages soutenant nos idées préconçues. Deuxièmement, nous ne devons pas oublier que la Bible moderne, telle que nous la lisons dans notre langue maternelle, est une traduction. Le traducteur de la Bible, même s’il a recours aux langues originelles, nous devance, car il opère une première interprétation. Nous devons nous assurer que son interprétation est fidèle au message. Contrairement aux adeptes de la méthode historico-critique, qui cherchent la vérité dans les écrits préscripturaires, il faut recourir au texte dans sa forme finale et baser notre exégèse sur les langues originales, choisies par Dieu. Troisièmement, le principe de l’analogie de la foi nous enseigne à donner priorité aux passages clairs, afin d’éviter d’ériger dangereusement des doctrines sur des passages obscurs, comme la doctrine de l’enlèvement de l’Église qui est bâtie sur un seul passage difficile. Quatrièmement, selon le principe de contrôle et d’auto-évaluation, l’interprétation doit toujours s’accompagner d’un modèle critique et réfléchi de vérification et de validation. Il faut que l’explication d’un passage soit soutenue par des règles fiables. Cinquièmement, reconnaissons avec humilité que nous ne savons et ne saurons pas tout concernant la vérité. « Nous voyons maintenant à travers un miroir, en énigme ; mais alors nous verrons face à face. Maintenant je connais en partie ; mais alors je connaîtrai comme je suis connu » (1 Corinthiens 13 : 12). Sixièmement, la Bible ne contient pas de mensonge. Dieu en est l’auteur. Il ne peut se trahir lui-même. Cela ne veut pas dire qu’il ne puisse pas rapporter les paroles mensongères d’un individu, mais il les rapportera sans erreur, tout en les condamnent. Septièmement, la Bible est cohérente. Il y a diversité parce que Dieu s’accommode à la compréhension humaine. Mais elle s’harmonise : il y a aussi unicité, puisque derrière les auteurs humains nous présupposons un unique Auteur. Huitièmement, le message chrétien est radical, et non trivial. Son message relève de la plus haute importance pour chaque être humain. Il renferme les réponses aux questions fondamentales. Neuvièmement, la Bible, puisqu’elle est la Parole de Dieu, est la valeur absolue, pour tous les temps et tous les peuples. Dixièmement, la Bible est la Règle d’interprétation par et pour elle-même (scriptura sui ipsius interpres). Onzièmement, il faut se rappeler de l’histoire de la rédemption pour l’interprétation. Douzièmement, les passages doctrinaux ont priorité herméneutique sur les passages poétiques, figurés, les récits, l’apocalypse, etc. Treizièmement, une focalisation christologique est nécessaire pour bien comprendre. Quatorzièmement, la direction du Saint-Esprit est indispensable à la compréhension. Elle n’est jamais opposée à la Parole de Dieu. Il ne faut jamais limiter ou dénigrer le rôle du Saint-Esprit. Elle ne s’oppose pas aux méthodes légitimes et ne remplace pas les écritures. Le Paraclet illumine le cœur des lecteurs, les rend aptes à comprendre. Quinzièmement, pour bien comprendre la Parole de Dieu, nous ne devons jamais sous-estimer l’importance de la communauté, car c’est pour être lue à l’intérieur de celle-ci qu’elle a été écrite. Les évangiles, les lettres et l’Apocalypse s’adressent soit à des communautés soit à des leaders de communauté. Seizièmement, la Bible a une dimension éthique. Son but ultime n’est pas l’intellection. Dix-septièmement, comprendre passe par l’application. Il faut que l’interprète se soumette à l’écriture. Il faut obéir à la connaissance déjà acquise ; Dieu ne veut pas se révéler à quelqu’un qui ne lui obéit pas. C’est le principe de l’obéissance à ce qui est déjà acquis. Il faut mettre de l’avant les vérités acquises. Pour finir, puisque nous avons qualifié de biblique l’herméneutique à la fois lorsqu’elle s’applique à l’Écriture Sainte et lorsque celle-ci lui sert de barème d’interprétation, nous pensons qu’il serait avantageux de voir la théologie pratique davantage en bénéficier, notamment dans les domaines des arts plastiques, de la musique, de la danse, du théâtre et de la littérature.
Pierre-Luc VERVILLE
Notes et références
- ↑ Notre texte doit énormément à l’enseignement d'Amar Djaballah, dont il épouse les grandes lignes.
- ↑ Le structuralisme est un courant de pensée qui privilégie la totalité et la synchronie, plutôt que l’individu et la diachronie.
- ↑ À titre indicatif, l’article « L’herméneutique et l’autorité de la Bible », de J. Parker, date de 1975.
- ↑ Amar DJABALLAH, L’herméneutique de la Bible, notes de cours (Herméneutique I), Faculté de théologie évangélique, Montréal, 2010, p. 31-33.
- ↑ Louis BERKHOF, Principles of Biblical Interpretation: Sacred Hermeneutics, Grand Rapids, Baker, 1950, 2e édition, 1977, p. 11.
- ↑ Bernard RAMM, Protestant Biblical Interpretation: A Textbook of Hermeneutics for Conservative Protestants, Grand Rapids, Baker, 1950, 3e éd., 1970, p. 1.
- ↑ Emil BRUNNER, cité par Alfred KUEN, Comment interpréter la Bible, Éditions Emmaüs, Saint-Légier, 1991, p. 12.
- ↑ Milton S. TERRY, Biblical Hermeneutics: A Treatise on the Interpretation of the Old and New Testament, 1re édition, 1980, p. 17.
- ↑ Comment interpréter la Bible, op. cit., p. 15.
- ↑ J. I. PACKER, 1978, « L’herméneutique et l’autorité de la Bible », Hokmah, No 8, p. 8.
- ↑ Olivier O’DONAVAN, The Way of Judgment. The Bampton Lectures, 2003, Grand Rapids, Eerdmans, 2005, p. 267.
- ↑ Comment interpréter la Bible, op. cit., p. 15.
- ↑ Comment interpréter la Bible, op. cit., p. 15
- ↑ Paul RICŒUR, Le conflit des interprétations, Éditions du Seuils, 2013, Paris, p. 511
- ↑ FEE, Gordon et STUART, Douglas, Un nouveau regard sur la Bible, Éditions Vida, Deerfield, 1990.
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- ↑ Grant OSBORNE, The Hermeneutical Spiral. A Comprehensive Introduction to Biblical Interpretation, Downers Grove, III., InterVarsity, 1991, p. 5.
- ↑ Le conflit des interprétations, op. cit., p. 514.
- ↑ Comment interpréter la Bible, op. cit., p. 23-26.
- ↑ ARISTOTE, Rhétorique, Les Belles Lettres, Paris, 1980, p. 108.
- ↑ Martin LUTHER, Œuvres, vol. 2, Labor et Fides, Genève, 1989, p. 117.
- ↑ L’herméneutique de la Bible, op. cit., p. 40.
- ↑ Voir les travaux de Gadamer, Ricœur, Taylor et Thiselton.
- ↑ L’herméneutique de la Bible, op. cit.
- ↑ Dieu a parlé, op. cit., p. 20.
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